Avant-propos

Bhaiji (Jyotish Chandra Roy) reçut les bénédictions de Mâ dans une abondante mesure. En privé et en réserve, Elle lui permit d'être dans Sa proximité ; et profitant de cette occasion en or, il Lui posa diverses questions spirituelles, et nota quotidiennement Ses réponses dans son journal. Ce journal fut le trésor qui inspira des ouvrages tels que Sad-Vani, Mâtri Darshan, Srî Charane et Dwâdash Vânî.

Dans la préface de la deuxième édition de Mâtri Daarshan en bengali (daté du 6 janvier 1948) le disciple de Mâ, Gangacharan Dasgupta, (l'oncle de Bhaiji) écrivit : "Il existe un autre long livre écrit de la main de Bhaiji, dans lequel il a consigné les comptes rendus de nombreux événements de Sa vie tels qu'ils lui ont été relatés par Mâ Elle-même, presque exactement dans Ses propres termes. Une grande partie du contenu de ce livre a été brièvement présenté dans son livre, Mâtri-Darshan." Ce livre fut traduit plus tard en anglais sous le titre Mother as Revealed to Me.

Avant de partir pour le Mont Kailash avec Srî Srî Mâ et Pitâji, Bhaiji remit le manuscrit du livre entier, écrit en bengali, à Dasgupta en lui demandant de l'éditer tel que cela avait été demandé, et de le faire imprimer dès que possible. Sur le chemin du retour du lac Mânsarovar, Bhaiji mourut à Almora, le 18 août 1937 (Jhulan Dwâdashî). Peu de temps après son décès, Dasgupta publia Mâtri Darshan.

Dasgupta conserva la partie restante du manuscrit, non encore éditée, jusqu'à ce que Gurupriya Devi (Didi) la reprenne après quelque temps. Selon toute probabilité, le manuscrit resta sous la garde de Didi jusqu'en 1955, on célébra le 60e anniversaire de Mâ à Bénarès (aujourd'hui connu sous le nom de "Varanasi") avec une pompe et une grandeur inégalées. Au milieu des préoccupations des célébrations, Gurupriya Didi, qui était alors malade, remit le manuscrit à Amal Sen pour qu'il le garde en sécurité. Après sa mort, le manuscrit resta chez son épouse pendant quelques années, jusqu'à ce qu'elle le remette à Jitendra Nath Dutta à New Delhi vers 1970. Jitendra Nath Dutta mourut le 23 septembre 1974 en présence de Mâ à Vrindavan. Ce manuscrit fut conservé en sécurité dans une bibliothèque de la salle pûjâ de sa résidence jusqu'à ce qu'il soit découvert vers 1980 par son fils, le coordinateur, qui en informa Swâmî Paramanandaji, secrétaire général de Shree Shree Anandamayee Sangha. Swâmî Paramanandaji enjoignit le coordinateur de continuer à sauvegarder et à préserver le manuscrit. Après que Ma eut quitté son corps temporel, le coordinateur rappela le manuscrit à Swâmî Paramanandaji, qui lui demanda de le photocopier pour qu'il le consulte. Après l'avoir parcouru, Swâmî Paramanandaji envoya la photocopie au Dr. Gopal Dasgupta avec l'instruction de le publier dès que possible. En 1985, ce manuscrit fut publié en bengali sous le titre de Mâyer Kathâ.

De la lettre qu'écrivit Gurupriya Didi, on apprend que ce manuscrit a été lu à Mâ. En l'écoutant, toutes les remarques que Mâ faisait, incitée par son kheyâl du moment, furent également incorporées dans le texte aux endroits appropriés. Dans sa "Présentation", Gurupriya Didi avait encore écrit : "... afin de les rendre plus compréhensibles, Kamal (connu plus tard sous le nom de Virajânandaji) et moi, et parfois Jogesh Brahmacharî, les avons lues à Mâ ; nous avons fait de notre mieux pour les comprendre autant que possible, et avons écrit les commentaires sur de nouvelles feuilles de papier. De cette façon, nous avons essayé de relater les faits réels au mieux de nos capacités, sur une période de seize années..."

De nombreux dévots, peu familiers avec la langue et l'écriture bengalies, exprimèrent leur regret de ne pas pouvoir lire Mâyer Kathâ et apprendre les premières lîlâs de Mâ telles que Bhaiji les avait consignées, et c'est ainsi que ce livre vit le jour.

Nous fûmes bouleversés par la réponse à la première édition anglaise du livre dans le monde entier, ce qui conduisit à la publication d'un édition révisée qui incorpore des incidents supplémentaires rapportés dans le Svakriya Svarasamrita et Sri Sri Anandamayi, volume I par Gurupriya Didi. En outre, nous avons ajouté quelques notes de bas de page supplémentaires, ainsi qu'une annexe et des photographies, éliminé les erreurs d'impression et apporté quelques corrections mineures.

Pour faciliter la compréhension du lecteur, certains photographes furent réarrangés pour assurer une séquence chronologique des événements. On trouvera entre parenthèses des explications aux mots sanskrits et bengalis, et par endroits dans les notes de bas de page, ainsi qu'un glossaire. L'index permet de localiser les pages de références respectives. Quelques incidents supplémentaires et quelques photos rares furent ajoutés.

Les lieux visités par Srî Srî Mâ sont indiqués sur la carte de l'Inde et du Bangladesh. En outre, on trouvera un plan d'aménagement du Ramna Âshram et du jardin de Shahbag à Dhaka, ainsi qu'une photographie de l'ancien Nâtmandir où différentes lîlâs divines se manifestèrent chez Mâ.

Quelques déclarations significatives concernant la révélation de Mâ comme étant l'Être Suprême omni-pénétrant ont été mises en évidence dans le texte, et également énumérées à la fin du livre. On s'est également efforcé de corréler certains incidents sur la base de données compilées par les Archives sur Mâtrî Lîlâ. Les lecteurs perspicaces y trouveront de nombreux conseils susceptibles de les aider sur leur voie de sâdhanâ.

Jai Mâ !

Le coordinateur

Bhaiji (Jyotish Chandra Roy)
1880-1937

Une brève biographie

Jyotish Chandra Roy, un haut fonctionnaire de l'Ordre du Service Impérial, était le plus éminent parmi les dévots de Mâ, et il en vint à La vénérer comme la Déesse Incarnée, la Déité de son éternelle adoration — Jagaddhârî Devî. Il eut la chance que Mâ l'accepte comme Son fils adoptif, et c'est ainsi qu'il fut connu sous le nom de Bhaiji (frère aîné), respecté et honoré de tous.

Bhaiji est né le 16 juillet 1880, le dixième jour de la phase lunaire croissante, dans une famille noble et aristocratique de Chittagong (alors connue sous le nom de Chattagram) dans le Bengale oriental (aujourd'hui le Bangladesh). Le père de Bhaiji, un homme pieux et siant, s'appelait Gobinda Chandra Roy. Bhaiji reçut son éducation dans sa ville natale. L'histoire de sa vie fut simple, belle et pure.

Lorsque Bhaiji travaillait comme officier supérieur au Département de l'Agriculture à Dhaka, il entendit parler des qualités divines de Srî Srî Mâ, et éprouva le désir intense de La rencontrer. Vers la fin de 1924, Bhaiji, accompagné de deux de ses collègues, rencontra Mâ à Shahbag (les vastes jardins appartenant au Nawab de Dhaka où son mari était employé comme administrateur). Au premier regard, il réalisa qu'Elle incarnait tout ce qu'il avait cherché toute sa vie dans de nombreux lieux sacrés. Avec la grâce duMâ, il accomplit les quatre étapes de la vie (brahmacharya, gârhasthya, vânaprastha et sannyâs) comme le prescrivent les textes sacrés hindous. Dans les derniers jours de sa vie, Mâ l'initia au sannyâs (vie monaistique), sur les rives du Mânsarovar, et lui donna le nom de Swâmî Mounananda Parvat.

Sur le chemin de retour du Kailash Mânsarovar, le 18 auût 1937, le 12e jour du calendrier lunaire, pendant le festival de jhulan, Bhaiji rendit son dernier soupir à Almora en présence de Mâ, Bholânâtji et d'autres personnes. Son samadhi se trouve à pataldevi, Almora, sur lequel un temple de Shiva fut construit et l'ashram de Srî Mâ vit le jour.

Après son décès, Bâbâ Bholânâtji écrivit une longue lettre à Gangacharan Dasgupta datée du 8 septembre 1937, dont on trouvera un extrait ci-dessous, et qui donne un aperçu de l'état spirituel de Bhaiji et de la profonde étendue de sa réalisation.

"Jyotish resta pleinement conscient jusqu'à la fin. Peu avant de mourir, il me dit : "Ecoute, Bâbâ, dans ce monde, personne ne peut être appelé soi-même. Seule Srî Srî Mâ est réelle".
Après avoir chanté "Mâ, Mâ", et "Om", il appela Hariram et lui dit : "
Ecoute, nous sommes tous un. Mâ et moi ne faisons qu'un. Pitâji et moi ne faisons qu'un".
Puis, fixant son regard sur Mâtâji et prononçant "Mâ, Mâ", il rendit lentement son dernier souffle."

(Mother as Revealed to Me, Page iii)

Bhaiji imagina le nom de "Ânandamayî Mâ" (Mère imprégnée de félicité) sous lequel Mâ est maintenant connue dans le monde entier. Il contribua à développer le concept de l'âshram idéal, des prières et du kîrtan, à établir la célébration de l'anniversaire de Mâ, à créer un drapeau de sept couleurs pour l'occasion, et à incarner un code de conduite par sa façon de vivre.

A la lecture du texte, on comprendra la véritable signification de la révélation de Bhaiji.

Jai Mâ !

Le coordinateur

Présentation

Bhaiji nota ces conversations avec Mâ et les compila avant son départ pour Kailash. Selon toute vraisemblance, il fit appel à plusieurs reprises à Mâ pour qu'Elle lui permette de les Lui lire à haute voix. Avant leur départ pour Kailash (en juin 1937), alors que Mâ séjournait à Bareilly pour quelques jours, il dit à Mâ sur un ton plutôt découragé : "Mâ, je n'ai pas encore pu réaliser mon souhait de Vous lire mes notes à haut voix. Nous allons bientôt partir pour Kailash, et nous n'en aurons pas le temps." Le voyant abattu, Mâ lui aurait dit : "Très bien, je les entendrai un de ces jours." Sur le chemin du retour de Kailash, Bhaiji décéda à Almora.

Au cours des années suivantes, nous avons nous aussi souvent essayé de Lui lire ces notes, mais sans le kheyâl de Mâ, rien n'est possible. Cette fois-ci, Mâ dit : "Vous semblez avoir établi une sorte de lien entre ce Corps et l'écriture que vous voulez Me faire entendre. Très bien, mettons un terme à tout cela cette fois-ci. Vous savez que, contrairement à vous, ce Corps a très peu à voir avec le fait d'écrire ou d'écouter quoi que ce soit. Tout finit par se réaliser...". C'est sans doute parce qu'Elle nous donna ainsi Sa parole qu'Elle veilla à ce que notre souhait soit enfin réalisé.

Il y eut beaucoup de corrections et de suppressions dans les notes de Bhaiji. Afin de les mettre en ordre, les notes étaient passées entre de nombreuses mains et, par conséquent, certaines pages s'étaient détachées et plusieurs étaient sur le point de se déchirer. Il était donc encore plus difficile d'en déchiffrer le contenu. Par endroits, il y avait des erreurs évidentes et un manque d'ordre séquentiel des mots. Cela pouvait être dû au fait que Bhaiji avait entendu les incidents de la bouche de Mâ et avait essayé de les coucher sur le papier beaucoup plus tard.

Pour de telles raisons, et afin de rendre ces notes plus compréhensibles, Kamal et moi, et parfois Jogesh Brahmacharî, les lisions à Mâ ; nous fîmes de notre mieux pour les comprendre et réécrivîmes le contenu sur de nouvelles feuilles de papier. Mâ n'était pas toujours réceptive à ce qu'on Lui fasse la lecture. Lorsque nous les lisions en sa présence, parfois Elle écoutait, parfois Elle faisait quelques commentaires, et parfois il était impossible de dire si Elle nous entendait ou non. Nous avons ainsi essayé de faire au mieux la chronique des faits réels sur une période de seize ans.

Il ressort de l'avant-propos de son livre que sur une longue période, et au cours de nombreuses conversations, Bhaiji posa des questions à Mâ, et sur la base de ses réponses, rédigea ses notes dans le but de les publier sous forme de livre à une date ultérieure.

Bhaiji décéda avant d'avoir pu accomplir tout ce qui devait être fait pour que les notes soient publiées. Personne d'autre que l'auteur lui-même n'a le droit de modifier le texte d'un livre ; c'est pourquoi nous n'avons pas jugé bon d'apporter trop de changements au manuscrit original, sauf ceux qui étaient absolument nécessaires. Dans la mesure du possible, les notes ont été laissées en grande partie telles quelles.

C'est une tâche impossible de faire expliquer ou clarifier quoi que ce soit totalement par Mâ ; Elle n'avait que très peu à faire avec de telles choses. Nous n'avons modifié que les parties au sujet desquelles nous avons pu obtenir des éclaircissements de Mâ au cours de conversations. Nous avons cependant incorporé dans le texte les faits nouveaux que nous avons pu glaner lors de ces entretiens.

Gurupriya Devi (Didi)

Gurupriya Devi (affectueusement appelée Didi) fut particulièrement proche de Srî Srî Mâ pendant plus de 50 ans, dont une grande partie en tant que Son assistante. Elle tint un journal détaillant les différents incidents de Mâtrî Lîlâ qui fournit de précieuses indications sur Mâ. Les journaux de Didi sont publiés en 18 volumes en bengali et en hindi et partiellement traduits en anglais (7 volumes). Elle contribua à la création de Shree Shree Anandamayee Sangha (une organisation enregistrée) qui incorpora les âshrams que les dévots de Srî Srî Mâ avaient établis dans les différentes parties de l'Inde, et aujourd'hui, elle est la gardienne du Samadhi Mandir de Mâ — "Mâ Ânandamayee Mahâ Jyoti Peetham" à Kankhal, Hardwar.