Extrait
chapitre
numéro
0

Japa

extraits choisis et trad. de l'anglais par Laurence E. Fritsch
Paris : Ed. La Table ronde, 1995

JAPA

Japa : La récitation verbale, murmurée ou mentale, du mantra ou du nom de Dieu.

Les enfants en bas-âge préfèrent jouer plutôt que d'apprendre à lire et à écrire.
Il faut leur donner le goût d'apprendre.
De la même façon, c'est de force qu'il faut répéter le Nom. Une pratique constante est nécessaire.

Lorsque la poussière se dépose sur un vase, il faut le dépoussiérer et le polir pour qu'il brille. Le frotter une seule fois ne suffira pas à le rendre propre. Pour enflammer une allumette, il faut la frotter : impossible de savoir à quel instant le feu jaillira. Il en va de même de la répétition du Nom. C'est une pratique assidue qui est le gage du succès. Epousez le yoga de la pratique.

La conscience que vous avez de votre incapacité à vous concentrer sur le Nom de Dieu est aussi Sa grâce.
Même s'il ne vous intéresse pas, prenez son Nom comme une médecine. Voilà qui aura également un excellent résultat. Vous allez faire des progrès. Car le Nom de Dieu n'est pas comme ces médecines d'ici-bas qui agissent parfois et parfois non.
Le Nom de Dieu porte toujours des fruits. C'est la raison pour laquelle on le répète.
Sinon allez à l'hôpital, prenez la médecine prescrite par le médecin, surveillez votre régime et vous guérirez. Vous pouvez encore prendre la médecine et faire le régime à la maison.
En d'autres termes, soit vous renoncez à tout et trouvez refuge seulement dans Son Nom, soit — si vous restez avec votre famille — vous agissez en conformité avec les instructions de votre gourou et maintenez une vie régulière. C'est un autre moyen de se débarrasser de ses maladies. Qui aimerait jamais qu'on lui fasse des piqûres ? Pourtant elles apportent un soulagement. Quel enfant aime apprendre à lire ? De la même façon, c'est par l'étude régulière sous la houlette des parents et des professeurs que l'on devient une personne éduquée. C'est ainsi pour apprendre lorsqu'il s'agit de buts terrestres, ne cessons pas de le répéter, si vous pouvez acquérir Brahmaridyâ, la connaissance de la Réalité, il y a un espoir que vous recouvrirez la santé suprême. Qu'est-ce que la santé suprême ? Personne d'autre que Dieu Soi-même.

Aucun effort n'est futile : toute tentative sert le but final. Supposez que vous devez vous rendre quelque part par le train. Afin d'attraper celui-ci, vous irez d'abord en bateau de votre village à Dacca en vous aidant d'une pagaie puis monterez dans une voiture à cheval qui vous emmènera à la gare. S'il est vrai que le but est le voyage en train, il est aussi vrai que le bateau, la pagaie, la voiture à cheval et ainsi de suite vous ont bien rendu service. De la même façon, il vous faut comprendre que tout ce que vous ferez afin de réaliser Dieu peut vous aider. Rien n'est perdu. Par quelque Nom que vous l'invoquiez, votre effort sera couronné de succès. La chose principale est d'adhérer à ce Nom avec constance.

Vous dites que l'esprit ne veut pas se concentrer sur le Nom. Qu'avez-vous à gagner à vous affoler dès que l'esprit vagabonde ici et là ? Réfléchissez bien plutôt de cette manière : "L'esprit ne m'obéit pas : très bien, je ne vais pas non plus obéir à l'esprit. Je continuerai de répéter le Nom du Seigneur." N'avez-vous jamais observer des enfants en train de manoeuvrer des cerfs-volants ? Ceux-ci ne montent-ils pas librement très haut avant d'être retenus par la longueur de la corde par laquelle ils sont attachés ? On peut comparer le cerf-volant à l'esprit et les objets des sens à l'air. Maintenez l'esprit attaché par la corde du Nom de Dieu : un jour ou l'autre il se calmera.

Il s'agit de maintenir la répétition du Nom du Seigneur. Par la pratique du Nom, ce sont le plaisir, la libération et la paix qui fleuriront et s'épanouiront. Avec foi, fermeté, confiance implicite et dévotion, laissez de côté votre fierté, adhérez au Nom et vous verrez que tout le travail se fera de lui-même. Quand ce corps était engagé dans le jeu de sâdhanâ, cette sorte de chose arrivait souvent et c'est la raison pour laquelle tant de stress lui était lié. Ne faites rien à la légère pour tester Dieu ; cela ne vous fera pas progresser vers la réalisation. Soumettez-vous complètement à Lui ! Votre fardeau, le fardeau du monde est à jamais porté par l'Unique qui soutient l'Univers — ne l'oubliez pas !

Lorsque vous travaillez avec les mains, vous répéterez Son Nom mentalement. Ce que vous accomplissez avec les mains est le mudrâ. Grâce à ce mudrâ-là, maintenez le flux de Son Nom. Le soin au malade, tout est fait à Son Service, tout est Son ouvrage. Faites de cette démarche la vôtre.

Tant que vous le pouvez, maintenez le flux du Nom sacré. Répéter Son Nom, c'est être en Sa présence. Tout comme un ami humain vous ouvre son coeur et vous dit tout de lui lorsque vous vous mettez à son écoute, ainsi, si vous vous associez à l'Ami Suprême, Il vous révèlera Son Etre véritable.
Sortez-vous de la mer lorsqu'une vague vient à vous ? Bien au contraire, vous plongez en plein milieu et prenez votre bain. De la même façon, au plus dense de la tempête et en plein coeur des difficultés de la vie d'ici-bas, efforcez-vous de maintenir Son souvenir, la répétition de Son Nom.

La pratique de japa contient en elle-même son bénéfice. Lorsqu'une personne pratique japa et en dédie le fruit à Dieu, celui-ci ne peut jamais être ni détruit ni perdu. Quand le temps est venu, Dieu le retournera au pratiquant. Au moment où le sâdhaka commence de noter que ses désirs et ses passions s'affaiblissent de plus en plus, il comprendra que Dieu est par ce biais en train de lui rendre le fruit de sa pratique. C'est la raison pour laquelle l'on pratique japa samarpana (offrande de sa pratique de japa à son Ista (1).
Il existe différents types de fleurs en fonction des différents types de pûjâ (2) de la même manière, il existe des mantras différents et des sortes variées de malas.

(1) Ista : signifie littéralement "Aimé". Il s'agit de l'aspect particulier du Divin avec lequel le disciple doit être en parfaite communion avant que la Connaissance du Divin Suprême soit possible.
(2) Pûjâ : pratique culturelle de l'hindouisme consistant en des offrandes aux divinités.

Il est certes nécessaire de s'aider des perles du mala pour pratiquer. Cependant, lorsque japa vient de soi-même — spontanément — n'est plus besoin de compter. Tant que la pratique de japa demande un effort, il faut compter. Là est toute la différence entre la pratique de japa et l'émergence spontanée de japa. L'esprit doit atteindre un état où il ne peut rester un instant sans le souvenir de Dieu.

N'avoir pour seule quête que la Révélation spontanée de ce palais de joyaux sous la forme du Verbe (Aksara). N'avoir pour seule quête que la Révélation spontanée de Dieu éternel et impérissable parce que présent au sein de Sa création — Suprême talisman de protection et de sécurité. N'avoir pour seule quête que la connaissance de Celui qui est à jamais équilibré en soi-même et Seul mérite d'être à jamais rappelé. Tel est le bien suprême.

La syllabe ou la série de syllabes — l'aksara — permettant la libération de l'esprit est appelé mantra. L'aksara est cinmayi (perméable, si l'on peut dire, à la conscience) ; c'est le Sahda Brahman que l'on appelle Nâma Brahman. Soyez convaincu que vous le trouverez dans le Nom. Croyez fermement que la graine enfouie au plus profond de votre conscience grandira sûrement et donnera un arbre.
De la même façon qu'il faut arroser et engraisser le terrain où la graine a été semée, tout pareillement la graine contenue dans la forme d'un mantra est faite pour éclore lorsqu'elle sera suffisamment nourrie par satsang (1)

(1) Satsang : La compagnie — sur le plan physique ou mental — des saints, des sages et des chercheurs de vérité.

Vous qui désirez Dieu, soyez Dieu formel ou sans forme, ainsi vous trouverez DIeu.

Le Nom et le Nommé sont identiques : car Lui-même apparaît comme le Nom. La lettre (aksara) est le masque personnel de Dieu. Lorsque le Nom que l'on répète commence de vivre, c'est comme la graine qui devien l'arbre.
Si la personne répète constamment le Nom qui l'attire le plus, elle parviendra à réaliser que tous les noms sont Son Nom, que toutes les formes sont Ses formes. Bien plus, elle verra bientôt qu'Il est sans nom et sans forme.

Le Brahman immuable, le son primordial, le Omkâra sont Un.
Ils sont Mâ — l'essence d'ânanda (1).

(1) Omkâra est le son primordial Aum. Ânanda est la félicité, la Joie ultime.

N'est-ce pas à Dieu que vous dites : "Vous êtes la Mère, Vous êtes le Père, Vous êtes l'Ami, le Bien-Aimé, le Maître !" ?
Car il est la Mère régnante (mayî), qui donne à chacun de nous ce dont il a exactement besoin — la Mère donne Sa chair à Sa chair.

C'est la semence d'une nouvelle graine qui détruit l'ancienne graine.
En d'autres termes, grâce à la constante répétition d'un "mantra graine" la graine du karma sera détruite et aucun autre karma ne pourra apparaître.

Ceux qui savent qui est leur Ista doivent, pendant qu'ils font japa, Le contempler depuis la couronne de Sa tête jusqu'aux pieds. Si l'on veut s'engager dans japa pour un long moment, il faut alors se concentrer sur le mot (sahda) tout en le répétant. Dieu est présent dans la syllabe (aksara) : Dieu est présent dans le son (sahda)