Extrait
chapitre
numéro
1

Satsang du 07 novembre

Questions-réponses avec Sri Mâ Anandamayi à Nadiad, mars 1979
Creative Commons At.

SATSANG DU 7 NOVEMBRE

Question : S’il vous plaît, Mâ, expliquez-moi comment il faut méditer.

: Selon la méthode qui vous a été enseignée par votre guru.

Question : Il y a beaucoup de gurus. Ils enseignent des méthodes de méditation différentes ; mais ici, en face de vous, nous sommes vos élèves. Expliquez-nous comment méditer ; quelle est votre méthode spécifique ?

Vous avez dit à plusieurs personnes que leur manière de méditer n'était pas correcte, car ils bougeaient la tête et ne gardaient pas un mental calme. Donc, quelle est la bonne méthode ?

: En jouant d'un instrument de musique on obtient un certain son.

Les gens ont des capacités différentes d'entendre le son, mais le son reste le même. De la même manière, le Soi (âtman) est Un comme le son d'un instrument, mais la capacité de le réaliser est différente selon les individus.

En ce qui me concerne, j'enseigne comme j'ai été enseignée par mon guru ; et mon guru est le Soi omniprésent ; or, ce guru enseigne de manière directe...

Quand vous rencontrez un guru, vous devez imaginer qu'il est le Soi, et qu'il a pris cette forme pour vous enseigner.


Commentaire de Swâmi Svatantrânanda (3) :

Mais le questionneur demandait comment faire pour sentir l'omniprésence de Dieu. Votre réponse serait donc : “La méditation, c'est être sans objet, avoir un mental vide d'objet. Le mental qui a cessé d'objectiver toute chose, c'est ça la méditation pure”.

: Ce swâmi a interprété mes paroles dans son propre sens...(rires de l’auditoire)

(3) Il faut savoir que Mâ était entourée sur l’estrade d’une impressionnante « brochette » de swâmis et qu’elle avait à cœur de valoriser les plus titrés d’entre eux en leur laissant le loisir de compléter ses réponses, en particulier sur tout ce qui relevait de l’érudition. Mais elle n’était pas dupe de la prétention affichée par certains swâmis et n’hésitait pas à l’occasion à se moquer gentiment d’eux, comme on le voit ici...

Question : Supposez que je suive un guru. Si après un moment je perds la foi en lui, que dois-je faire ? Dois-je continuer à suivre son enseignement ?

: Si vous suivez un guru un jour et un autre le lendemain, cela ne vous mènera nulle part.

Mais avez-vous vraiment perdu la foi dans le principe même du guru ? Que reste-t-il si vous avez perdu cette foi ?

Interlocuteur : Parfois, c'est inévitable.

: Ce que j'ai voulu dire, c'est que le guru est le Soi omniprésent. Comment est-il possible de perdre la foi dans un tel guru ?

Question : Laissons de côté ce problème du guru et revenons au problème de la méditation.

: Oui. Selon l'interprétation du swâmi, quand on accepte que le guru c'est le Soi, alors il faut demeurer sans objet. C'est ça la méditation. Mais il y a ici tellement de gens différents, avec des impressions différentes (vasanas), des tendances latentes différentes (samskaras), des traditions et des psychismes différents ! Comment serait-il possible d'enseigner une méthode de méditation convenant indifféremment à tous ?

Swâmi Svatantrânanda : Mâ, si vous n'enseignez pas ces gens, ils s'en iront ailleurs ! (rires de l’auditoire)

: Continuez la méthode à laquelle vous êtes habitué... La manière dont Svatantrânanda Baba a expliqué la méditation est très juste. Chacun doit s'efforcer d'être sans objet (autre traduction possible : de cesser l'identification avec tout objet).

Question : Vous ne faites qu'éluder la question !

: Bien ! Je vais donc expliquer ce qu'est la méditation...

Ici un autre interlocuteur coupe la parole à Mâ et le satsang change de thème (4).

(4) Le satsang du soir était un moment très vivant, presque familier, qui constrastait fortement avec le reste de la journée très silencieuse et méditative. Nous étions nous- mêmes un peu surpris du relatif désordre apparent qu’il y avait dans la prise de parole des différents intervenants, ce dont témoigne entre autres cette rupture inattendue dans le cours du dialogue...

Question : Il y a tellement de gens en face de vous, des riches, des pauvres, etc. Pourquoi viennent-ils ici ? Pourquoi ne sont-ils pas heureux de ce qu'ils sont ?

: Le vrai bonheur n'est pas quelque chose qui s'acquiert, que l'on possède et dont on puisse se satisfaire. Le bonheur acquis est un bonheur dont on est prisonnier. Vous devez aller au-delà de la prison de ce bonheur.


Question : Combien de temps devons-nous ainsi "voyager" vers cette perfection ?

: Jusqu'à ce que vous ayez atteint le but, vous devez continuer à avancer. Je vous dis la Vérité. Tant que ce but transcendant n'est pas atteint, vous êtes forcément soumis au bonheur acquis, donc au malheur.

Question : La "méditation" sur les objets extérieurs, sur les objets ordinaires d'attachement, est facile pour moi. Mais j'éprouve beaucoup de difficultés à méditer sur Dieu. Pourtant, vous dites que Dieu est Amour et qu'on peut donc facilement éprouver de l'amour pour lui. C'est seulement si mon amour pour Dieu s'accroît que je pourrai réellement méditer sur lui. Comment puis-je donc faire pour augmenter mon amour pour Dieu ?

: Vous devez rechercher la compagnie des sages (satsangha). Par exemple, ici, nous sommes en période de contrôle et d'ascèse. Beaucoup d’entre vous ont même pris ponctuellement des vœux (5). Si vous suivez cette discipline correctement, vous augmenterez votre pouvoir (shakti) en fonction de l'intensité de vos pratiques (tapas).

Celui qui vit en compagnie de sages, qui écoute la lecture des Ecritures Saintes et les commentaires inspirés et qui développe une attitude fraternelle envers autrui, celui-là entre sûrement dans la bonne voie.

(5) Les participants à cette semaine de retraite étaient invités à prendre des vœux destinés à augmenter leur implication dans l’ascèse, voeux concernant entre autres l’alimentation, le sommeil, l’absence de parole et l’hygiène corporelle.

Question : Quand on va dans une confiserie, on trouve un grand nombre de sucreries alléchantes et on est tenté d'en demander des échantillons avant de faire son choix. Mâ donnez- nous des échantillons de confiseries spirituelles avant que nous nous engagions plus avant dans la voie !

: Pour atteindre ou obtenir la lumière du Soi vous devez vivre en compagnie des sages, lire de bons livres spirituels et avoir un comportement juste (dharmique). Ces trois éléments vous conduiront à la lumière du Soi. C’est une très belle voie pour atteindre le Soi.

Question : D'après un verset bengali : “Si en pratiquant les bajans (chants religieux), on abandonne tout attachement, ceux- ci peuvent conduire à l'extase divine”. Par la grâce de Mâ, peut- on, nous aussi, obtenir cet état pendant les bajans que nous chantons ici ?

: La complète reddition, la totale offrande et l'intense dévotion à Dieu, cela seul suffit à conduire à cet état.

Question : Notre mental est toujours plein d'agitation. Quelle est la méthode la plus simple et la meilleure pour le contrôler afin qu'il devienne calme et tranquille ?

: Chacun a son propre guru, et pour contrôler votre mental, la meilleure méthode est celle que vous a enseignée votre guru.

Question : Certains disent : "Il faut servir les pauvres et les nécessiteux avec dévotion pour obtenir la libération." Voilà ce que j'ai entendu de mes aînés. Mais, j'ai aussi entendu des mahâtmas (6) dire qu'il fallait pratiquer une ascèse (sadhana) pour obtenir la Libération.

De ces deux chemins, quel est le meilleur ? Quel est celui que vous me recommandez ?

: Quel est celui que vous préférez ? C'est votre inclination qui devrait déterminer votre choix. Mais, puisque vous me posez la question, suivez donc les deux méthodes !

(6) Le mot mahâtma signifie littéralement « grande âme » et s’applique en pratique aux instructeurs spirituels ou aux chefs religieux d’envergure.

Autre interlocuteur : En supposant que quelqu'un ne soit en mesure de suivre aucune de ces deux méthodes, laquelle conseilleriez-vous en troisième lieu ?

: Puisque la première personne qui m'a posé cette question a parlé de ces deux voies, cela signifie qu'elle peut au moins suivre l'une d'elles.

Ceci dit, à propos de la première voie, rappelez-vous que, jusqu'à ce qu'on ait réalisé le Soi, on est toujours pauvre et nécessiteux...