Extrait
chapitre
numéro
8

Entretiens du 22 avril 1985 (après-midi)

Entretiens avec Atmananda
Medirep, 1986

Lundi 22 avril 1985 (après-midi)

Q.- Je voudrais vous parler maintenant de la santé de Mâ. Il est certain que Ma subissait des maladies parce qu'elle le voulait bien et si elle en avait le Kheyalâ. Mais il est évident aussi qu'elle avait tout pouvoir pour s'en débarrasser et retrouver instantanément la santé quand il le fallait. Vous m'avez cité de nombreux exemples ces jours derniers, dont je n'ai pas pris note.

At.- Sans aucun doute ! Mâ, dans ce domaine, agissait comme elle voulait. Voici un autre exemple dont je ne vous ai pas parlé. C'était dans les années 1938-1940 à peu près. A cette époque, j'étais en Inde, mais pas encore avec Mâ. Cette fois là, tout le monde a cru qu'elle allait mourir. Elle présentait tous les signes d'un cancer généralisé. Les médecins ne lui accordaient que peu d'heures à vivre. Tous ses organes étaient successivement envahis par la maladie.

Son visage était cyanosé et elle éprouvait des douleurs terribles. Si bien que le médecin prit la décision de lui administrer de la morphine. Ce que Mâ refusa.

Le disciple de Mâ, Hari Ram Joshi, qui a relaté ce fait se trouvait avec elle à Hardwar. A cette époque, les ashrams de Hardwar et de Kankhal n'existaient pas encore. C'est alors que Hari Ram Joshi dut partir à Dehradun pour un court voyage. Pendant ce temps, le médecin qui la soignait la vit tout à coup si mal qu'il pensa que ses derniers instants étaient arrivés. Mâ lui demanda si Hari Ram était de retour. Ce à quoi il répondit par la négative. Alors tout à coup, le corps de Mâ se mit à prendre toutes sortes de positions yoguiques. Et le médecin qui était présent la vit soudain sous les traits de la déesse Dourga. Lorsque le lendemain le disciple revint de Dehradun, elle lui dit ainsi qu'au médecin: "Alors, dites-moi ! Maintenant où est le cancer ?" Elle était de nouveau en parfaite santé. Et cela s'était produit en quelques heures. Le médecin, la nuit précédente, s'était trouvé sur la véranda où donnait la porte de la chambre de Mâ. Il raconta qu'il vit tout à coup un être semblable à un grand singe, qui se tenait sur la véranda, près de la porte de Mâ, sauter dans le Gange qui passait au dessous.

Et il se souvint qu'un jour, Mataji avait dit que les maladies ont des formes semblables aux nôtres: "Je les vois -disait-elle- si elles s'approchent de quelqu'un. Et lorsqu'elles s'approchent de moi pour me visiter, je les vois également, mais pourquoi les chasserais-je ? Tous les êtres sont les manifestations de l'UN, alors ils sont les bienvenus chez moi".

Le docteur demanda: "Ma, est-ce la maladie qui a sauté hier dans le Gange ?" Mâ répondit simplement: "Vous pouvez croire ce que vous voulez !" Et elle n'en dit pas davantage.

Q.- Mataji ne confirma, ni n'infirma ?

At.- Non, elle n'ajouta rien de plus. D'ailleurs, ce que je viens de vous dire a été publié dans le livre "Mâ Anandamayi Lila" "Memoirs of Hari Ram Joshi", et traduit dans le livre allemand dont je vous ai parlé "Gesprache mit der gluckseligen Mutter Shri Anandamayi".(Mangalan Verlag - S. Schang - 1985) L'auteur a fait un très beau travail et a choisi plusieurs témoignages très intéressants..

L'heure de nous rendre à l'ashram étant arrivée, nous partons comme chaque soir à pied pour Kishenpur. Juste un quart d'heure de marche. Il est 17 heures. Ce soir à 20 heures 30, commence la grande fête d'Akshaya Tritiya. Plusieurs hommes se promènent sur la route devant nous. Lorsque nous parvenons à leur hauteur, ils reconnaissent Atmananda et la saluent avec respect en joignant les mains: "Jay Mâ I Jay Mâl" disent-ils. Et nous répondons: "Jay Mâ". Ce sont des fidèlees de Mataji qui viennent d'arriver pour la fête.

A l'ashram comme chaque soir Atmananda dirige le Kirtan. Bien qu'âgée de 81 ans, elle a une voix étonnamment pure. Et je la regarde, elle qui fut une grande musicienne, tandis qu'elle accompagne d'une main, sur un orgue poussif, les versets des chants sacrés avec l'autre main, inlassablement, qui actionne la soufflerie du petit instrument à vent, sorte d'harmonium si répandu en Inde, et sans lequel un Kirtan ne serait pas tout à fait un Kirtan !

Pendant que se déroulent les chants, I'ashram se remplit petit à petit d'une foule tranquille. Dans deux heures commencera la fête. Dès que la nuit tombera, les festivités débuteront par le chant des hommes qui entameront le nam-yagnya', le 'sacrifice du Nom', mouvement de circum- ambulation autour d'une sorte d'autel, érigé au centre du hall de l'ashram. Il est formé de trois cubes superposés, de tailles décroissantes, s'élevant à plus de deux mètres, et entièrement recouvert de feuilles de bananiers, orné de fleurs, de lumières et de guirlandes, au milieu desquelles ont été installées les images de Sri Krishna, de Nitai Gouranga, d'autres encore, ainsi que des photographies de Mataji et de Didima, la mère de Mâ. Les femmes prendront ensuite la relève pour la nuit, puis à l'aube, de nouveau les hommes, et ainsi successivement, jusqu'à la tombée de la nuit, le lendemain soir. Le mouvement giratoire ne s'arrêtant jamais, et s'effectuant toujours en présentant son côté droit, en signe de respect, à l'autel sur lequel sont exposées les images des dieux et des déesses de l'Inde.

Après le Kirtan, alors que la nuit est déjà tombée, nous rentrons chez nos hôtes. Nous marchons dans l'obscurité sur la route qui va de Dehradun à Mussoorie. Il fait très bon, et le parfum des arbres en fleurs qui bordent l'avenue nous parvient par bouffées odorantes, tandis que les phares des voitures, par intermittences, éclairent notre chemin.