But Ultime
Question : Quel est le travail du Guru et quel est le travail du disciple ?
Réponse : On dit que la tâche du disciple est d'effacer l'ego et de devenir un blanc. On raconte l'histoire d'un roi qui invita les meilleurs artistes à peindre des fresques dans son palais. Deux peintres travaillaient dans la même salle, sur des murs opposés, avec un rideau entre eux, de sorte qu'aucun d'eux ne pouvait voir ce que faisait l'autre.
L'un d'eux a créé un tableau merveilleux, qui a suscité l'admiration de tous les spectateurs. L'autre artiste n'avait rien peint du tout. Il avait passé tout son temps à polir le mur - et l'avait poli si parfaitement que lorsque le rideau était retiré, le tableau de l'autre peintre se reflétait d'une manière qui le faisait paraître encore plus beau que l'original.
C'est le devoir du disciple de polir le moi.
Question : Mais alors la majeure partie du travail doit être accomplie par le disciple ?
Réponse : Non, car c'est le gourou qui peint le tableau.
Un saint est comme un arbre. Il n'appelle personne et ne renvoie personne. Il donne refuge à quiconque veut venir, que ce soit un homme, une femme, un enfant ou un animal. Si vous vous asseyez sous un arbre, il vous protégera des intempéries, du soleil brûlant comme de la pluie battante, et il vous donnera des fleurs et des fruits.
Il importe peu à l'arbre qu'un être humain ou un oiseau goûte à ses fruits, ses produits sont à la disposition de tous.
Et enfin, l'arbre se donne lui-même. Comment ? Le fruit contient les graines de nouveaux arbres de même nature.
Ainsi, en vous asseyant sous un arbre, vous obtiendrez un abri, de l'ombre, des fleurs, des fruits et, en temps voulu, vous apprendrez à vous connaître. C'est pourquoi je dis, réfugiez-vous aux pieds des Saints et des Sages, restez près d'eux et vous trouverez tout ce dont vous avez besoin.
De même que, sans l'aide de professeurs et d'experts, on ne peut devenir compétent dans les connaissances mondaines enseignées dans les universités, de même la connaissance sublime de l'Absolu ne vient pas sans la guidance d'un Guru compétent. Le problème est de le trouver, que ce soit pour le progrès spirituel, la libération ou toute autre question, aussi insignifiante qu'elle puisse paraître.
Considérer le gourou comme un individu (un corps) est un péché.
Le Guru doit être aimé et vénéré comme Dieu.
Il doit être clair que l'action du pouvoir du gourou équivaut virtuellement à un fonctionnement de la volonté. On peut dire que cette soi-disant volonté est dérivée de la puissance du gourou. Par conséquent, c'est l'Unique Lui-même qui se manifeste à la fois dans le pouvoir du gourou et dans le pouvoir de la volonté. Qui ou quoi est ce Soi unique ? Tout ce qui est manifesté est Lui et nul autre. Pourquoi alors l'autodépendance, l'effort personnel, l'effort humain et autres devraient-ils être classés séparément ? Bien sûr, on peut les différencier des autres, à condition de considérer qu'ils sont dus à l'action du gourou intérieur.
Il y a des chercheurs de Vérité qui sont déterminés à procéder sans gourou - leur approche consiste à mettre l'accent sur l'indépendance et le travail personnel.
Si l'on va au fond des choses, on s'aperçoit que dans le cas d'une personne qui, poussée par une aspiration intense, accomplit la sadhana en comptant sur ses propres forces, l'Être suprême se révèle d'une manière particulière à travers l'intensité de cet effort personnel. Dans ces conditions, est-il justifié, à quelque point de vue que ce soit, de soulever des objections à cette confiance en soi ? Tout ce que l'on peut dire ou mettre en doute à cet égard se situe dans les limites de la pensée humaine. Alors qu'il existe un état où tout est possible.
Ainsi, la ligne d'approche qui consiste à dépendre de ses propres forces et capacités n'est, comme toutes les autres approches, qu'un fonctionnement du Pouvoir Unique. Sans aucun doute, le pouvoir même du Guru peut opérer d'une manière spéciale à travers cette confiance en soi, de sorte qu'il n'y aura pas besoin d'un enseignement extérieur. Si certains aspirants peuvent dépendre d'un enseignement extérieur, pourquoi d'autres ne seraient-ils pas capables de recevoir une guidance de l'intérieur sans l'aide de la parole ? Pourquoi cela ne serait-il pas possible, puisque même le voile dense de l'ignorance humaine peut être détruit ? Dans de tels cas, l'enseignement du Guru a fait son travail de l'intérieur.
Personne ne peut prédire à quel moment précis les circonstances vont coopérer pour que le Grand Moment se produise pour quiconque. Il peut y avoir un échec au départ, mais c'est le succès final qui compte. Un aspirant ne peut être jugé sur la base de résultats préliminaires : dans le domaine spirituel, le succès final signifie le succès dès le début.
Après que le gourou ait donné le sannyasa, il se prosterne de tout son long devant le disciple afin de démontrer qu'il n'y a pas de différence entre le gourou et le disciple, car tous deux ne font qu'un.
Il y a un stade où l'on ne peut pas se considérer comme un gourou, ni accepter quelqu'un d'autre comme un gourou. À un autre stade, il est impossible de considérer le gourou et le disciple comme distincts l'un de l'autre. Il y a encore un autre stade où ceux qui donnent un enseignement ou une instruction dans ce monde sont considérés comme des gourous : en promulguant les innombrables méthodes et formes conçues dans le but d'atteindre la réalisation du Soi, ils aident l'homme à progresser vers ce but.
Q : Quel est le but de l'existence ?
Mâ : Tendre à se connaître soi-même.
Q : Brève réponse pour une si vaste question !
Mâ : Un arbre-banian est immense, sa graine est petite ; mais dans la graine, tout l'arbre est là.
Question : Comment la réalisation du Soi s'effectue-t-elle ?
Réponse : En recevant et en conservant le pouvoir du Guru. Ce qui est déjà en vous se révèle. Une personne dont le cerveau n'est pas clair ne peut être enseignée. De la même manière, le pouvoir intérieur de connaître son Soi est réalisé en s'engageant dans la sadhana. C'est comme une connexion électrique. S'il n'était pas en vous, vous ne pourriez pas le découvrir. Tout comme certaines personnes - mais pas toutes - possèdent le don d'écrire de la poésie ou de s'exprimer oralement, etc. Si c'est le destin de quelqu'un, les écailles tomberont de ses yeux, le voile tombera. Cela se produit tout seul, un autre ne peut pas donner la réalisation ; il faut devenir propriétaire de sa propre connaissance intérieure.
Chacun est né avec ses tendances et ses talents innés. De même que l'on peut acquérir des connaissances matérielles, on peut aussi connaître la réalité en devenant propriétaire de son pouvoir intérieur - et c'est alors qu'il y a l'éveil.
Le pouvoir du Guru est conféré aux disciples, mais seul un parmi des millions est capable de le détenir. Le mantra a un pouvoir propre et sa répétition ne sera pas vaine, mais le pouvoir du Guru n'est pas conféré à tous.
Mâ : Pour celui qui est dans la Vérité pure, tout est soit "Je" soit "Tu".
Je le répète, "Je", "Tu" et l’univers, tous trois se dissolvent dans le Suprême.
C’est ceci, atteindre Dieu ou avoir la vision de Brahman.
Pramatha Babu : Mais on dit que Dieu vient et se manifeste ; Les gens peuvent parler avec Lui. Est-ce que tout cela est faux ?
Mâ : je dis que c’est tout à fait faux.
(Après un bref intervalle) Je dis encore que c’est tout à fait vrai. C’est ce dont nous parlions ce matin.
Ces visions, ces vibrations sont vraies tant que nous sommes au niveau d’une nature fondée sur le besoin.
Au moment-même où nous nous installons dans notre véritable nature, toutes les distinctions disparaissent.
Bithika Mukerji : Mâ, comment peut-on expliquer la personnification de l’Etre Suprême en tant que Dieu ?
Mâ : Quoi que l’on puisse dire, Personnel, Impersonnel – Le Seigneur est Lui-même tel qu’Il est.
Il est la réalité absolue, omniprésente dans l’univers, autant que demeurant au plus profond de l’être (antaryâmin).
Il est au-delà de toute compréhension, et en même temps, Il est le Soi intérieur en chacun, n’est-ce pas ?
Lui seul est (qu’on le considère comme inconnu, ou à connaître)
Celui qui est sans nom, sans forme. Cependant, tous les Noms sont Siens, Il est présent partout et universellement manifesté.
Où n’est-il pas ? Quand on touche la main de quelqu’un, il dit : « Ceci est moi ». Même ses vêtements indiquent sa présence.
Toutes les religions reconnaissent Sa présence, elles prennent leur source en lui. Comment saisir cette immensité ?
Prenons l’exemple d’une personne seule dans le tourbillon des relations (irradiant de lui) : il est le père, le fils, le mari, le frère, etc.
Il en est ainsi dans toutes les religions. Ce sont toutes des relations intimes et chacune est unique en elle-même.
Q : Les chrétiens croient que le Christ est une Incarnation, la seule Incarnation envoyée pour sauver l’humanité. Il est le seul médiateur entre Dieu et l’homme.
Mâ : D’accord, il est certainement juste pour les chrétiens de croire cela, pourquoi pas ?
La foi perd de sa vigueur spirituelle si elle est universalisée. Ce n’est pas nécessaire d’en arriver là.
La miséricorde illimitée de Dieu est répandue partout, Lui seul sait ce qui est bon pour chacun de nous. Si chaque individu regarde son propre voyage spirituel, alors il peut apporter l’aide la meilleure à ses compagnons de route.
Chaque communication de la Vérité est un évènement unique. Aucun de ces évènements ne peut être comparé à un autre.
En célébrant cette Vérité, les communautés religieuses (sampradaya) se forment ou prennent tournure. Les communautés également sont nécessaires. Elles fournissent la cohésion, l’unité générale des objectifs à atteindre, et elles donnent du courage à ceux qui ont un moral faiblissant.
C’est une bonne idée que d’appartenir à une communauté et de marcher sous sa conduite pour obtenir l’illumination.
Il n’est pas nécessaire de se méfier de la foi de nos amis chercheurs de Vérité.
Q : Les chrétiens restent attachés très fortement à l’unique évènement historique de l’Incarnation du Christ. Ils sont engagés dans leur mission.
Mâ : Pourquoi devrions-nous poser des limites à l’infini, ou des restrictions de temps à ce qui est intemporel, c'est-à-dire l’éternel ?
L’infini a des moyens infinis pour se révéler lui-même. Personne n’a le droit de dire ‘c’est seulement ainsi et pas autrement’.
Bien que, à proprement parler, un tel credo est aussi admissible, car chaque optique est concevable. Après tout, quelle est l’étendue de ce que l’on peut rejeter - à l’intérieur de l’ensemble de la Vérité ?
Réclamer l’exclusivité est une façon de renforcer sa propre foi et sa dévotion, mais dénigrer la loyauté des autres est déplacé, injustifié.
Le véritable pèlerin devrait apprécier les efforts de ses amis grands voyageurs.
Q : Si quelqu’un croit en une seule et unique Incarnation, comment peut-il comprendre la vérité des autres manifestations ?
Mâ : L’Incarnation est vraiment seule et unique, c’est une descente, une venue, une approche, un avènement, chacun étant unique à sa façon.
Comme je l’ai dit, il n’y a rien ni personne à part Dieu.
Le vrai nœud de la question est qu’il faut aller de l’avant !
Pour avancer dans une direction, il est exigé un effort suprême, constant, déterminé, sans faille.
Se détourner de ce but par comparaisons et contrastes équivaut à ralentir, à moins que certains ne soient habitués à un renforcement de leurs objectifs dans un esprit d’unité, de communion. L’Un englobe tous les chemins menant à la réalisation de cette vérité.
Q : Mâ, on ne peut pas croire en l’Un, en l’Unique seulement. Une créature, un être, sont séparés de Dieu pour toujours.
Mâ : Oui, bien sûr. Comme Dieu ne peut pas être saisi par le mental, Il est séparé pour toujours.
Etre humain veut dire habiter dans le monde des images mentales. Le mental limite la compréhension.
Dieu est séparé de l’être parce qu’il demeure au-delà des idéalisations du mental. Ce qui est suprême est, par conséquent, au-delà encore.
Aussi, il est juste de dire ‘Dieu et sa créature’. La compréhension de la séparation est elle-même la ligne de partage [italiques ajoutées par Bithikâ].
Il est votre soi le plus profond, votre témoin le plus intérieur, votre vous le plus intime.
Q : Est-ce qu’un médiateur est nécessaire pour connaître Dieu ?
Mâ : Oui, mais Dieu lui-même se révèle comme le Gourou (Médiateur). Le Gourou est Dieu lui-même.
Lui seul connaît les exigences du vrai disciple. Pour invoquer la présence du Gourou on doit devenir un vrai disciple.
Q : Est-ce que tous les chemins ont la même valeur ?
Mâ : Oui, pour autant qu’un chemin soit suivi de façon concentrée, sincère et persévérante.
Cependant, il existe des chemins et sentiers qui se révèlent être des déviations.
Quelqu’un naît avec certaines prédilections (samskaras) qui façonnent les attitudes. La façon de vivre est un amalgame d’actions, de croyances et de connaissances (karma, bhakti, jñâna). La façon dont on organise sa vie déterminera le chemin à suivre.
Dans la sphère de la recherche de Dieu, l’aide fixe de façon inévitable, même si quelqu’un est ignorant et ne distingue pas clairement la voie juste, notre chemin est réorienté dans la bonne direction par le Gourou qui apparaît immanquablement de façon à apporter de l’aide et à montrer la route. Ce sont les propres efforts de chacun et la sincérité qui doivent être évalués, pas les faits.
Q : Comment peut-on savoir si on n’est pas en train d’errer sans but ?
Mâ : Quiconque est sur le chemin en quête de Cela est touché par la paix de la vérité.
Dans ce domaine où celui qui cherche trouve, il n’y a aucune possibilité pour qu’un véritable effort soit fait en vain, ou qu’un manque de sincérité produise des résultats.
L’effort est requis parce que l’homme utilise sa volonté pour atteindre des buts matériels.
Ainsi la volonté peut également devenir comme des courroies qui conduisent l’homme au-delà de ses limites.
En réalité, seule la miséricorde de Dieu prévaut. Quand on fait un pas vers lui, Il en fait dix vers nous.
En fait, Il est constamment avec nous. La recherche en elle-même devient, par conséquent, la conclusion.