Guru
Vijayananda a demandé : ‘Peut-on atteindre la Réalisation en intensifiant une émotion comme l’amour?’
Mâ : Oui, prema, l’amour pour Dieu, est une voie. Mais ce que le monde appelle amour est moha, "illusion".
Il n’y a pas d’amour vrai entre les individus. Comment pourrait-on recevoir un pur amour de quelqu’un qui est limité par l’égocentrisme et la possessivité ?
Les gens me disent : “Mon amour pour Untel est vrai, ce n’est pas un amour ordinaire”.
Mais ils se bercent d’illusion, moha est toujours un amour pour ce qui est mortel et conduit donc à la mort.
Si vous ne pouvez pas obtenir l’objet de votre amour, vous voulez le tuer ou mourir vous-même.
Mais l’amour de Dieu, prema, conduit à la mort de la mort, à l’Immortalité.
C’est la raison pour laquelle, dit-on, c’est un péché de considérer que le Guru est limité à un corps humain. Il faut considérer que le Guru est Dieu.
Je connais une femme qui voulait se suicider quand son Guru est mort ; je lui ai dit :
‘Un Guru meurt-il ? Ce n’est pas parce qu’il a quitté son corps qu’il est mort.
Le Guru est omniprésent et n’abandonne jamais son disciple. Si vous voulez mettre fin à vos jours parce qu’il est parti, cela montre que vous l’aimez comme une personne, pas comme un Guru.’
Il arrive que les gens tombent amoureux de leur Guru, mais s’il s’agit d’un guru authentique il peut sublimer leur amour et le diriger vers le Divin. Mais s’il n n’a pas transcendé la personnalité, alors il y aura des problèmes.
Il arrive assez souvent que des jeunes filles inexpérimentées ou de jeunes veuves, voire des femmes mariées, se laissent entraîner sur un mauvais chemin. On dit qu’il faut abandonner son être entier, corps, esprit et coeur au Guru. Abandonner son corps signifie abandonner ses désirs au Guru afin qu’ils puissent être éliminés : cela ne signifie pas s’abandonner physiquement.
Question : Qui a la capacité de conférer le pouvoir et qui le reçoit ?
Réponse : Celui qui peut libérer quelqu'un du cycle incessant de la naissance et de la mort est en effet un gourou ; c'est lui qui détient l'autorité pour conférer le pouvoir. De même qu'un enfant ne peut engendrer avant de devenir un jeune homme, il y a un stade où l'on devient un réceptacle et où, au bon moment, le Guru lui transmet le pouvoir.
Question : Le pouvoir peut-il être conféré quelle que soit la nature du réceptacle ?
Réponse : Il peut modeler le réceptacle.
Question : Ainsi, si le réceptacle n'est pas prêt, le Guru refuse-t-il le pouvoir.
Réponse : Non, quand une inondation arrive, elle emporte tout le monde avec elle.
Question : Quel est le moyen d'entrer dans la marée ?
Réponse : Poser cette question avec un empressement désespéré.
Question : Comment susciter une telle ardeur ?
Réponse : En gardant le satsang pendant une longue période. Là où est détruit ce qui est voué à la destruction, là se révèle le Bien-aimé. Pour ceux qui ont reçu l'initiation, il convient de consacrer un tel temps à la répétition de leur mantra et à la méditation - ce n'est qu'alors que l'éveil aura lieu.
Q : Je ne sais pas comment méditer, ni ne me sens incliné à cela. J'ai peine à trouver de l'intérêt pour les choses spirituelles, mais l'agitation a aussi peu d'intérêt. Quelle est la solution ?
Mâ : Ce que cette petite fille vous conseille, est de vous asseoir sous un arbre.
Q : Quel genre d'arbre ? Mais là où j'habite, il n'y a pas d'arbre.
Mâ : Par "arbre", nous voulons dire un vrai sage. Un sage est semblable à un arbre. Il n'invite ni ne repousse personne. Il donne une ombre bienfaisante à quiconque vient près de lui, qu'il soit un homme, une femme, un enfant ou un animal. Si vous vous asseyez à ses pieds, il vous protègera des intempéries, du soleil brûlant comme des trombes d'eau, et il vous donnera des fleurs et des fruits. Qu'un homme ou un oiseau les goûtent lui importe peu ; ce qu'il produit, il le donne à qui vient à lui.
(Satsang rapporté dans Ânanda Vârtâ)
Q : Est-il nécessaire de s'en remettre à un guru ?
Mâ : C'est vrai, on peut se suffire à soi-même.
Mais si un guide donne la direction, ça aide !
Q : Cela sert-il à quelque chose de prendre l’initiation d’un Gourou qui ne présente pas les signes caractéristiques d’un gourou authentique, tels qu’ils sont définis dans les Ecritures ?
Mâ : Il y a deux choses ici. Premièrement, prendre un Gourou et deuxièmement que ce Gourou soit le Gourou.
Il ne peut être question de prendre ou de quitter, car ce Gourou est le Soi. S’il ne l’est pas, il se peut qu’il vous indique un chemin, mais il ne peut pas vous conduire jusqu’au but, jusqu’à l’illumination, parce que lui-même ne l’a pas atteinte. Vous pouvez prendre quelqu’un comme Gourou et puis le quitter, mais dans ce cas je dis que vous n’avez jamais eu de Gourou.
On ne peut pas quitter le vrai Gourou.
Il est le Gourou par sa nature même et il comble naturellement toutes les lacunes du disciple. Tout comme la fleur donne son parfum naturellement, le Gourou aussi donne l’initiation par le regard, la parole, le toucher, l’enseignement, le mantra ou même sans rien de tout cela, simplement parce qu’il est le Gourou. La fleur ne fait d’effort pour donner son parfum, elle ne dit pas : ‘Venez me sentir’. Elle est là. Quiconque s’approche d’elle pourra jouir de son parfum.
Tout comme le fruit mûr tombe de l’arbre et est ramassé par quelqu’un ou mangé par les oiseaux, ainsi le Gourou est tout ce dont ont besoin ceux qui lui appartiennent, quels qu’ils soient.
Il y a effectivement de faux gourous et beaucoup s’y laissent prendre. On dit que vous devez vous donner corps et âme au Gourou, mais cela ne signifie pas qu’il a le droit de vous exploiter. S’il essaie de la faire, vous devez le quitter et la plupart du temps laisser aussi le mantra qu’il vous a donné parce qu’il lui est associé et qu’il vous fait penser à lui.
Alors je dis : allez vous baigner dans le Gange et prenez un nouveau départ avec un autre mantra. Un mantra est ce qui protège. S’il ne remplit pas cette fonction, ce n’est pas un mantra.