Extrait
chapitre
numéro
12

Réponses diverses

itinéraire avec Mâ Ananda Moyî, textes rassemblés et présentés par Jacques Vigne
Lyon : Ed. Terre du ciel, 1997

Chapitre IV - RÉPONSES DIVERSES


Que pensez-vous des écoles de psychologie occidentale qui disent que quelqu'un en bonne santé psychique doit affirmer son ego ?

Cela dépend du type de personnalité. Si vous avez une personnalité « tamasique » (asthénique) et que vous lui demandez d'effacer son ego, elle va s'endormir. Il vaut mieux lui demander de s'affirmer. Si vous avez une personnalité « rajasique » (excitée), il faut lui demander, au contraire, de mettre son ego en veilleuse. Détruire l'ego ne signifie pas tout détruire, puisque l'ego n'est qu'une coquille autour du Soi. Il s'agit plutôt d'une dissection permettant de retirer la coquille et de laisser apparaître le Soi. Il ne faut pas, comme dit le proverbe anglais, « jeter le bébé avec l'eau du bain ». Il faut être déjà « sattvique » pour détruire son ego. Un sujet ordinaire qui veut détruire d'emblée son ego risque de devenir idiot.

Faut-il attendre du guru une écoute des détails du mental, comme le fait le psychanalyste ?

Le guru et le psychanalyste ont des fonctions tout à fait différentes, bien qu'à première vue elles semblent similaires. Le psychanalyste a affaire à un sujet psychopathologique, c'est-à-dire quelqu'un dont le mental est déséquilibré, quelqu'un qui, en général, n'a pas la capacité de maîtriser ou de connaître son propre mental, et qui a besoin de quelqu'un en qui il a confiance pour lui montrer ce qui cloche dans sa tête. Mais le sâdhaka ne doit pas être psychopathologique, car il serait alors disqualifié pour faire une sâdhanâ sérieuse. Il doit déjà avoir des qualités de base pour que le guru puisse l'accepter comme disciple. Il doit être intelligent, avoir déjà une certaine maîtrise de soi, de la discrimination et la ferme détermination de découvrir ce qui est au-delà de l'illusion du mental. La tâche du guru sera alors de lui transmettre du pouvoir pour lui donner l'intensité qui lui manque en général ; de lui faire prendre conscience de ses points faibles en le plaçant dans des conditions où ces faiblesses viennent en surface avec une douloureuse intensité. Ce n'est que très rarement que le véritable guru lui expliquera les détails du fonctionnement de son mental. Il rejettera le sâdhaka sur lui-même, le forçant à découvrir par lui-même comment son esprit fonctionne.

Quel crédit peut-on accorder sérieusement aux propos convaincus tenus par beaucoup en faveur de la « réincarnation », alors qu'une réflexion approfondie et l'évidence montrent qu'il n'y a pas d'entité capable de décider de se réincarner ? Il suffit de partir à la recherche de l'origine de la « conscience personnelle de soi » pour écarter toute théorie ‘reincarnationniste’, me semble-t-il. Je crois que l'enseignement de Ma n'a pas été constant à cet égard et dépendait de l'interlocuteur auquel elle s'adressait. Pouvez-vous préciser cela ?

Il est vrai que du point de vue de la Vérité absolue, il n'y a pas de réincarnation. L'âtman, le Soi, est conscience purement omniprésente, il est toujours semblable à lui-même. Le moi individuel est une formation illusoire qui n'a pas de réalité substantielle, mais ceci est la vision du sage qui a atteint la réalisation parfaite. Pour l'homme ordinaire, il y a une réalité empirique qui a son propre dynamisme. Quand le Soi s'identifie à une forme physique, une entité personnelle surgit, ce qu'on appelle l'ego, ou le moi individuel. Cet ego est une chose constamment en mouvement, alors que le Soi, I'âtman, est statique. Ce mouvement est dû à une perte d'équilibre. L'âtman se voit dans une réflexion de luimême sur le corps. Il s'identifie à cette réflexion. Or le corps est imparfait, mortel, douloureux, etc. et l'âtman est parfait, immortel, il est bonheur, etc. Identifié au corps, I'âtman a perdu sa nature primordiale et essaie de la retrouver (par erreur) à travers le corps. Le bonheur devient alors une objectivation, quelque chose qu'on essaie d'obtenir à travers le corps et les organes des sens. Cette recherche du bonheur dans l'objectivation s'appelle désir. L'entité illusoire qu'on appelle ego peut être comparée à un tourbillon. Ce tourbillon continuera à se mouvoir aussi longtemps qu'il sera animé par son moteur qui est le désir, et sa compagne la peur ou la colère. Quand le corps physique mourra, le tourbillon de l'ego continuera à se mouvoir et se saisira d'une autre forme afin de réaliser les désirs qui n'ont pas été satisfaits. C'est ce tourbillon fait de désirs et d'aspirations insatisfaits qui se réincarne.

Vous qui connaissez l'hébreu, connaissez-vous bien la Kabbale ?
Je ne veux pas mélanger les symboles particuliers de la Kabbale avec ceux de l'hindouisme. De manière générale, les symboles, moins on en a, mieux c'est.- Quand vous dites : « les symboles, moins on en a, mieux, c'est », j'ai du mal à saisir. Trop de concepts, oui; trop de mots, oui. Mais trop de symboles ? ...

Le but de toute sâdhanâ est d'amener le mental au silence. Quand les mouvements du mental ont cessé totalement, le Réel impensable se révèle de lui-même, parce qu'il est toujours présent derrière ce voile formé par l'agitation mentale. Pour parvenir à ce silence, on pourrait dire que - dans les grandes lignes - il y a deux voies possibles : La première est celle du jnâna-mârga (la voie de la Connaissance), qui s'occupe d'emblée d'observer le mental et de connaître son fonctionnement tant dans sa partie consciente que dans les abîmes de l'inconscient. Quand on arrive dans les domaines du subconscient et de l'inconscient, il faut faire face souvent à des expériences terrifiantes, et le sâdhaka risque de perdre son « équilibre mental ». Et même s'il réussit à surmonter les difficultés qu'il rencontre, il se trouvera finalement avec la possibilité en face de lui d'une dissolution totale de son moi individuel, quelque chose de plus redoutable même que la mort physique. Cette voie est très difficile ; peu de gens sont capables de la suivre. C'est comme si on traversait une étroite passerelle jetée au-dessus d'un abîme. Je l'appellerai la « voie des yeux ouverts ».
La deuxième voie - ce serait la « voie des yeux bandés » - se sert de symboles pour traverser les arcanes de l'inconscient. Les passages difficiles sont interprétés - dans la voie de la dévotion, par exemple - comme des épreuves envoyées par le Divin ('ishta dévatâ') qu'on adore ; la dissolution du mental, comme une union avec le Bien-Aimé. Dans le tantrisme, d'innombrables symboles sont utilisés puisqu'ils servent à traverser les passages difficiles. Mais il faut savoir les rejeter quand on est arrivé à une maturité spirituelle et à une capacité de regarder en face les faits tels qu'il sont en réalité. C'est-à-dire que tous ces symboles n'ont qu'une réalité empirique et que ce ne sont que des béquilles mentales. Si on ne peut pas marcher d'emblée sans béquilles, il faut au moins savoir les abandonner le plus tôt possible.

Que faire pour se libérer d'une cicatrice laissée par une forte déception affective ?

Il ne faut pas chercher à l'oublier. Il ne s'agit pas de faire du « rafistolage », comme en psychologie. Ne cherchez pas à éliminer la cicatrice. C'est parce qu'on ne voit pas son effet libérateur que la souffrance paraît un mal. Le Pouvoir Divin vous donne un coup pour vous réveiller, comme le ferait un ami s'il voyait que vous vous endormez dans la neige ou dans une forêt dangereuse. Si le premier coup n'est pas bien fort, vous dites : « Je préfère dormir » et vous vous rendormez peu après ; mais si votre ami est un véritable ami, il vous secoue plus fort jusqu'au moment où vous êtes complètement réveillé. Il n'y a pas besoin de chercher à se débarrasser de tels souvenirs: ils agissent comme une épine irritative dans votre mental pour vous amener au détachement. Il faut s'en servir pour arriver à la source de toute souffrance qui est la fausse croyance que nous sommes des individualités distinctes, séparées du Grand Tout. (à propos de ceux qui voient partout l'action du guru) on ne peut s'empêcher d'interpréter ; I'important est d'interpréter dans le bon sens.

Comment se protéger des influences extérieures si on sent qu'elles ne nous aident pas ?

La vraie cuirasse, c'est le Dharma : constamment, même pour de petits détails, se demander où est le dharma et où est l'adharma, et ensuite aller dans le sens du dharma quel qu'en soit le prix. Alors, vous serez invulnérable. Personne ne pourra vous faire de mal.

On comprend, dans la méditation, I'intérêt de se désidentifier des émotions négatives ; mais faut-il suivre les émotions positives ?

Oui, certainement ; le bonheur est la véritable nature de l'homme. Il faut cependant distinguer entre le bonheur calme, qui se développe avec la sâdhanâ, et les plaisirs accompagnés d'excitation qui entraînent nécessairement leur contraire tôt ou tard. Il faut contrôler ces derniers. L'ego se sent toujours misérable, le moi réel est toujours heureux. (En parlant de la quantité de conditionnements auxquels sont soumis le corps et l’esprit.)

Le sâdhaka va au-delà de la nature. L'être humain habituel est comme un buffle ou un taureau qui se laissent effrayer par une petite fille avec un bâton ou qui ont peur de manquer d'une botte de foin. Si le taureau était intelligent, il donnerait un coup de corne à la petite fille et pourrait librement dans la forêt. La nature nous enchaîne de la même façon. C'est le principe de la carotte et du bâton. Nous avons peur de la souffrance et peur aussi de manquer nos petits plaisirs. Pour se libérer de l'esclavage de la nature, il faut donc tenir tête à la souffrance et ne pas se laisser attacher par les plaisirs. Alors, on pourra découvrir le vrai Bonheur du Soi, au-delà du plaisir et de la peine.

Que peut donner le guru, des techniques, ou un pouvoir ?

Le guru donne un pouvoir, il peut favoriser un éveil de la kundalinî, mais ce n'est qu'un stade de la sâdhanâ. Il ne peut donner la Réalisation, mais il peut aider à retirer les obstacles qui voilent cette Réalisation déjà présente en nous.

Que signifie l'abandon à la volonté du guru ?

Avec Mâ, j'essayais de répondre immédiatement à la moindre de ses suggestions. Comme cela, il était possible d'être libéré de certaines conséquences d'actes antérieurs. Si l'on n'obéissait pas, Mâ disait : « Oui, c'est bien aussi, fais comme tu penses. » Mais à ce moment-là, on devait subir les conséquences karmiques de ses actes. Il n'y avait pas en fait de question d'obéissance envers Mâ, puisque l'obéissance suppose plus ou moins la peur. J'éprouvais envers Mâ de l'amour, de la vénération. À cause de cela, je pouvais suivre les conseils pratiques qu'elle me donnait de temps en temps, même si ces derniers n'étaient pas très adaptés à la situation réelle qu'elle n'avait pas bien visualisée. Par contre, je ne lui ai jamais abandonné ma liberté d'esprit. Le ‘surrender’ (abandon) de l'esprit, ce n'était pas pour moi. Ce que je cherchais chez Mâ, c'était la transmission directe d'un pouvoir pour m'aider dans ma sâdhanâ, et elle me l'a donné abondamment.

Certains voient dans le Védânta un intellectualisme desséché.
En quoi le Védânta et l'amour sont-ils liés ?


C'est un reproche qui a souvent été fait à ceux qui pratiquent exclusivement la voie de la Connaissance. Dans cette voie, l'élément est utilisé au maximum par la pratique de la discrimination entre ce qui est transitoire et ce qui est réel ; par l'observation du mental et la remontée à la source - notre « moi » ; ou bien aussi par la recherche du « Qui suis-je ? », comme l'enseignait le grand sage Râmana Mahârshi. Mais se limiter seulement a l'élément intellectuel, c'est du faux Védânta, c'est vouloir voler avec une seule aile. Il faut deux ailes pour voler, et la deuxième aile, c'est l'élément affectif, c'est la bhakti. Le védantin, en général, n'adore pas de Dieu personnel (bien qu'il n'y ait aucun inconvénient à ce qu'il le fasse s'il en éprouve le besoin). Son amour est dirigé vers le guru, non pas la personne physique du guru, mais vers celui qui est jnana mûrti, I'incarnation de la Connaissance ; celui qui nous mène vers le Suprême Omniprésent, le Sans-Forme, I'akshara brahma qui est notre Soi Réel. Pour le vrai védantin, l'amour qu'il a pour son guru s'adresse à travers lui à cet Éternel Omniprésent impérissable qui n'est affecté par rien, même par la dissolution finale. C'est un amour d'une haute qualité qu'il faut avoir éprouvé pour savoir ce que c'est. En réalité, il n'y a pas deux voies différentes, celle de la Connaissance et celle de l'Amour. Jnana et bhalti sont les deux aspects de la même sâdhanâ ; ils sont inséparables.

Chez certains, jnana est en surface et bhakti dans les profondeurs ; chez d'autres, c'est l'inverse. Dans les Upanishad, on parle de rasa (I 'essence du bonheur) qui motive toutes nos actions et pensées : pouvez-vous développer ce point ?

Les mots sanskrits ont souvent des significations différentes selon le contexte dans lequel ils sont utilisés. Il en est ainsi pour le mot rasa; dans la Taittiriya Upanishad, ce mot est utilisé dans un sens spécial (II-7). Rasa, ici, est la substance même dont le Suprême est fait. « Raso veisa » : « Cela, en vérité, est rasa ». Dans tous les objets de nos désirs, ce que nous recherchons, c'est le plaisir qu'ils nous donnent, c'est-àdire le rasa (le goût de ces objets). Ces plaisirs sont seulement une réflexion du rasa suprême. « Celui qui obtient ce rasa », dit l'Upanishad, devient heureux (ânanda bhavati). Tous nos mouvements, toutes nos pensées, même notre respiration sont mus par ce Bonheur Suprême, qui remplit l'Espace.

La méditation bouddhiste fondamentale, essentiellement basée sur l'observation des sensations du corps, ne risque-t-elle pas de renforcer paradoxalement l'attachement au corps ?

L'observation des sensations du corps est une des méthodes utilisées dans la voie de la Connaissance, et n'est pas spéciale au bouddhisme. Les mouvements du mental peuvent toujours être ramenés à une sensation qui a été leur point de départ. Se familiariser avec ces sensations peut devenir une aide considérable pour connaître et maîtriser notre mental. Je ne crois pas que cette méthode puisse renforcer l'attachement au corps physique, parce que la découverte que notre corps est en réalité une usine de décomposition et de pourriture devrait amener plutôt à un dégoût de notre forme physique ; mais cette méthode n'est pas à conseiller à des psychopathes ou à des hypocondriaques qui pourraient se découvrir toutes sortes de maladies imaginaires. En règle générale, des psychopathes ou des aliénés mentaux ne doivent pas avoir accès à des pratiques spirituelles sérieuses.

On peut facilement interpréter certaines paroles de Mâ comme s'il n'y avait rien à faire. Est-ce une vision équilibrée de son enseignement ?

L'enseignement d'un sad-guru n'est pas un enseignement ex-cathedra. Il s'adapte à chaque individu, selon son niveau intellectuel et son développement spirituel ; et même pour un individu donné, les conseils du sage varieront à mesure que le disciple progressera sur l'échelle du monde spirituel. Le plus souvent, les paroles d'un sage sont comme des poteaux indicateurs la route. Leurs indications sont utiles, voire même vitales pour ceux qui voyagent sur cette route ; mais distribuer des photos ou des copies de ces indications à tout venant ne servirait pas à grand-chose. Aussi, les paroles de Mâ doivent être placées dans leur contexte. Sinon, elles pourraient paraître contradictoires. Par exemple, à certains individus elle conseillait de renoncer au monde ; à d'autres, elle recommandait chaudement de vivre la vie des gens mariés. Tout dépend du niveau de l'individu qui pose la question. Il est vrai qu'en dernière analyse, il n'y a rien à faire pour atteindre le Suprême, puisqu'il est toujours là, présent en nous ; mais il y a beaucoup de choses à défaire : c'est-à-dire les impuretés, les complexes, les fausses croyances qui masquent le Réel. « Ne rien faire » d'emblée, pour une personne ordinaire, est une tâche impossible. Demandez simplement à « monsieur Tout-le Monde » s'il est capable de rester cinq minutes assis sur une chaise, sans bouger, même le petit doigt, sans cligner de l'œil. Et je ne mentionne même pas l'incapacité d'arrêter le flot des pensées. Il faut apprendre à ne « rien faire » en commençant par des efforts pour ralentir le mouvement. Et c'est ce qu'on appelle une sâdhanâ, qui doit nous mener finalement vers l'état de non-agir parfait.

On dit que la voie que suivait Mâ était celle de la purification (vishuddha mârga). Pouvez-vous préciser ?

Mâ disait que ce qu'elle enseignait, c'était la voie indiquée par les rishi et les muni des temps anciens, c'est-à-dire le sanâtana-dharma, la voie classique de l'Inde transmise par les Véda et les Upanishad. C'est ce qu'on appelle aussi le vishuddha mârga, la voie de la purification (du mental). Le mental est le voile qui masque le Réel. Ce voile est fait des trois guna (sattva, rajas et tamas). Quand tamas prédomine, le voile devient très épais, comme des nuages noirs qui masquent complètement le ciel. Rajas est activité, agitation frénétique comme les vagues qui empêchent de voir le fond du lac. Quant à sattva, c'est le calme, la pureté, I'état de contentement, etc. Le mental n'est pas encore dissous, mais le voile qui masque le Réel est transparent. Le vishuddha marga consiste donc à augmenter le sattva guna aux dépens de rajas et de tamas. Sattva, c'est la pureté ; la pureté commence par la propreté du corps (bain journalier) et celle de la nourriture : alimentation végétarienne peu épicée ; et ensuite la pureté du mental, en observant les cinq yama (règles) telles qu'énoncées dans les sutra de Patanjali: brahmachârya (chasteté), satya (dire la vérité), astéya (honnêteté), ahimsâ (absence de violence), aparigraha (absence d'avidité). Il convient en plus d'occuper le mental par des pensées divines, la méditation, etc. Quand le mental est inondé de sattva guna et que tamas et rajas ont presque disparu, il se dissout spontanément dans le Suprême.

Quelle est la fonction de phases de solitude prolongées et complètes dans la vie d'un sâdhaka ?

La solitude complète est bonne pour une sâdhanâ intensive, mais elle est temporaire. Par exemple, quand vous préparez un examen, vous vous enfermez dans votre chambre jusqu'au moment où vous l'avez passé, et après vous pouvez en sortir. Mais la solitude complète trop prolongée n'est pas bonne. Vous vous coupez des autres, vous vous enfermez dans votre tour d'ivoire, vous obtenez une fausse réalisation. Vous créez une tension et, à cause de cela, vous ne pouvez trouver la paix de l'esprit. Où que vous soyez, il y a un entourage. Même dans mon ermitage, à Dhaulchina, il y avait les bergers, les visiteurs, les gens du village : j'étais en très bons termes avec eux et ils me considéraient comme un membre de leur famille. Il faut toujours être en harmonie avec l'entourage, même si celui-ci ne consiste qu'en des arbres et des corbeaux : c'est le point essentiel. Il ne faut pas créer de barrière, de conflit. Si des gens dans l'âshram me demandent s'ils doivent observer la solitude ou le silence complet, je le leur déconseille. Évidemment, pour des gens qui travaillent, qui sont entourés par des centaines de personnes qui leur posent des questions, qui leur parlent, il y a distraction, et c'est mieux de se mettre à l'écart, dans la mesure du possible. Il faut distinguer la solitude, attitude mentale, et l'isolement physique : celui-ci est utile pour un temps, car il ralentit les pensées, mais la solitude mentale - « Je veux me couper des autres, je ne veux voir personne » - n'est pas bonne. Quoi que vous fassiez, il faut toujours faire tous les efforts pour être en harmonie avec l'entourage. Certes, il y a des cas particuliers où il faut rompre certaines relations ; il est difficile de généraliser.

Vous avez dit qu'on était en solitude pour passer un examen : quel est le niveau de cet examen ?

Même si le sâdhaka sort de son isolement physique, il ne doit pas abandonner sa sâdhanâ pour prêcher avant d'avoir la réalisation.

Pour un sâdhaka qui vit dans le monde, est-ce que le fait d'aspirer directement à la libération (moksha) ne risque pas de créer un écartèlement entre ses aspirations et ses capacités réelles ?

Moksha n'est pas pour tout le monde. Moksha, la libération complète, est pour ceux qui ont complètement renoncé au monde, c'est-à-dire les sannyâsin, ou ceux qui ont renoncé mentalement sans prendre l'habit du sannyâsa. Pour ceux qui vivent dans le monde, il y a une autre voie, celle de la libération progressive (krama mukti). Par la dévotion pour son ‘ishta devatâ’, par le rituel et la pûjâ quotidienne, dans le contexte indien, le bhakta, s'il réussit, atteint le Brahmâ cosmique au moment de la mort. La voie directe de la libération immédiate (sâdhya mukti), elle, est pour le sannyâsin.
Le bouddhisme distingue aussi entre voie abrupte et voie progressive, entre Zen, par exemple, et dévotion Bouddha de la compassion (Amitâbha). Dans la voie progressive, on fait sortir le prâna par le sommet de la tête (brahma-randhra) au moment de la mort. Mais le quatrième stade de la vie, le sannyasa, rompt avec cette libération progressive et les pratiques qui y mènent. Le sannyasin veut la libération immédiate, ou à la rigueur au moment de la mort, quand il se sépare du corps (vidéha-mukti). Dans une Upanishad, on parle du libéré-vivant de cette façon : « Nastosya prana utkramanti », « celui dont les prâna ne montent pas (au moment de la mort) ». Comme il est déjà identifié à la conscience omniprésente, la mort n'est pas pour lui un changement de niveau de conscience.
En Occident, la meilleure voie est le karma-yoga : « Fais ce que doit, advienne que pourra ». Faire son travail au maximum de ses capacités, sans se préoccuper des résultats. Si ça réussit, c'est bien ; si ça rate, c'est bien aussi. Faire l'action pour la joie de l'action. Pour ceux qui sont intensément dévoués au guru, à Mâ par exemple, il y a une autre voie : offrir toutes ses actions comme un sacrifice à Ma avec la perspective qu'au moment de la mort, ils seront accueillis par elle et se fondront dans son être. Il est dit que quand on est très dévoué au guru, il apparaît au moment de la mort.

Dans la bhakti, faut-il laisser aller les émotions ou les maîtriser ?

La voie de la dévotion (bhakti) convient à des individus chez lesquels l'élément affectif, émotionnel du mental est plus développé que l'élément intellectuel. De tels individus auront des difficultés à observer leur mental et à suivre ce qu'on appelle le vichara marga (la voie de la discrimination, du discernement). Ils auront donc intérêt à utiliser leur émotivité pour progresser sur le chemin spirituel. Ces émotions devront être purifiées et transmutées en amour pour le Divin. Quand cet amour devient très intense, il culmine en union mystique. Alors, l'ego se dissout dans le Divin. Quand il n'y a plus d'ego, il n'y a plus de mental non plus, car l'ego est la racine et la source du mental.
La bhatki n'est donc pas un laisser-aller pour des émotions déréglées. Il faut savoir jouer avec les émotions, mais ne jamais être leur jouet. On peut laisser une émotion s'intensifier, mais jamais au point où on perd le contrôle. Je me souviens avoir vu une fois, à Vrindâvan, un pandit qui suivait la voie de la dévotion faire une démonstration en présence de Mâ Ananda Moyî pour nous montrer ce qu'était la vraie bhakti. Il pouvait se laisser aller aux émotions religieuses les plus intenses puis les arrêter brusquement et passer à une autre émotion. Cela demande une très grande maîtrise du mental, bien plus difficile que pour la répression d'une émotion.

Comment développer une conscience qui soit au-delà des expériences ?

Dans chaque expérience, il y a le fait même de l'expérience et le sujet qui vit cette expérience. Cette dualité : celui qui voit, et l'objet qui est observé, existe dans toutes nos sensations et dans nos expériences les plus banales. En fait, d'après le Védânta, il n'y en a pas deux, mais trois, c'est-à-dire Celui qui voit (I'éternel témoin), l'objet qui est vu (qui fait partie de prakriti) et le fait de voir, qui relie les deux premiers. C'est ce qu'on appelle la tripûti. Par la discrimination et la méditation intensive, on finit par comprendre que ces trois ne font qu'un, et que notre croyance en leur séparation est illusoire. Qu'il y ait une conscience unique sous-jacente à ce procédé de fission en trois, c'est ce qu'on appelle le tripûti nâsha, la destruction de la tripûti.

Vous faites parfois allusion à un stade au-delà de la distinction observateur-observé, où l'on ne fait qu'un avec l'action. Krishnamûrti en parle également. Pouvez-vous préciser ?

Pour l'homme ordinaire, il y a dans chaque perception trois éléments : celui qui observe, l'objet de la perception, I'acte d'observer. Cette distinction est illusoire, car en réalité (du point de vue du sage parfait), ces trois éléments font partie d'un bloc homogène. L'erreur provient de ce que nous croyons en l'existence d'individualités séparées : le « moi », I'ego (ahamkara). Cet ego projette un « autre » qui devient l'objet de perception, et la relation entre les deux devient l'acte de percevoir. L'effort d'échapper à ce cercle vicieux est ce qu'on appelle une sâdhana. Le but de toute sâdhana est de percevoir ce bloc homogène, le Réel, où tous les éléments se dissolvent dans la Grande Unité. Ce Réel est masqué par le mouvement du mental. Ce sont les vagues qui empêchent de voir le fond du lac. Quand le mental devient silencieux (totalement silencieux, jusqu'en ses couches les plus profondes), le Réel se manifeste spontanément, puisqu'il est 62 toujours là, comme le soleil qui est présent quelle que soit l'épaisseur de la couche de nuages.
Toutes les sâdhana quelles qu'elles soient, ont donc pour but final d'amener le mental au Silence. Krishnamûrti (puisque vous le citez dans votre question) se réfère principalement à une méthode d'observation du mental. Dans la méthode classique (Védânta et autre), on conseille de prendre l'attitude de témoin des mouvements de notre mental. C'est-à-dire observer le mental comme si c'était quelqu'un d'autre. Mais en faisant cela, on scinde le mental en deux : une partie qui observe (car l'observateur fait partie du mental) et une autre partie qui est observée.
Ce que Krishnamûrti conseille, si j'ai bien compris, c'est de se laisser emporter par le mouvement du mental, tout en restant intensément conscient. Dans ce cas-là, il n'y a plus un témoin qui observe et une chose observée, mais un courant mental qui coule naturellement. Cette méthode est bien sûr la meilleure, mais n'est pas pour le débutant, qui risque d'être emporté par le courant des pensées et d'aller à la dérive. Aussi, pour un sadhaka moyen il est préférable de prendre l'attitude du témoin des mouvements du mental.
Encore là, il ne faut pas observer directement ou essayer d'étudier le mental. Car le mental est capable de créer toutes sortes de choses quand on essaie de l'étudier.
C'est un peu comme une mère qui observe son gamin en train de jouer. S'il se voit observé, il fera toutes sortes de blagues. Elle devra le surveiller « du coin de l'œil » tout en continuant son travail. Il en est de même pour le mental. Il faut prendre un point d'appui (montra, de la respiration, etc.) et observer le mental du coin de l'œil.

Au moment où nous entrons dans I'année du centenaire de Mâ, comment voyez-vous l'avenir des âshram et de la sangha qui se sont constitués autour d'elle ? Comment envisagez-vous le développement de son enseignement, en Inde d'une part, en Occident d'autre part ?

L'organisation religieuse appelée Shrî Shrî Mâ Anandamayî Sangha est relativement récente (vers 1952), comparée à des organisations fermement établies, comme la Mission Râmakrishna par exemple.
Aussi longtemps que Mâ était présente physiquement, rien ne se faisait sans son assentiment et ses conseils ; et ses suggestions (elle ne donnait presque jamais d'ordres) étaient respectées sans discuter par ses proches disciples et acceptées comme venant d'une source divine. Elle avait fait construire tout un réseau de temples, au moins un dans chaque âshram. Comme le service de ces temples doit se faire journellement et sans interruption par un brahmane qualifié, et chaque fois que cela est possible par un brahmacharîn appartenant à l'organisation, elle a créé ainsi une solide infrastructure qui lie les disciples à leur âshram.
Cette infrastructure est en quelque sorte le squelette qui donne sa solidité à l'organisation. Depuis que Mâ a quitté son corps physique (en août 1982), l'administration de la Sangha se fait selon des principes démocratiques, c'est-à-dire que les décisions sont prises par le Comité directeur (Governing Body) selon l'opinion de la majorité de ses membres. Ce Comité a quarante-deux membres des deux sexes. Les membres laïcs (vingt et un) sont élus à bulletin secret par l'assemblée générale de la Sangha. L'autre moitié du Comité est constituée de ce qu'on appelle les ascetic members, c'est-à-dire les brahmacharin et moines des deux sexes vivant dans les âshram. Ceux-ci sont nommés (et non élus) par le Comité de direction.
Ce Comité est maintenant l'autorité suprême et ses décisions ne peuvent être révoquées que dans des cas tout à fait exceptionnels et selon une procédure compliquée.
Pour les questions religieuses et spirituelles, nous avons un Sadhu Committee, composé de neuf membres (augmenté récemment de deux) choisis par les moines et brahmacharin les plus éminents de l'organisation. Ce comité, néanmoins, n'a pas de pouvoir exécutif. Il présente ses conclusions au Governing Body, qui prend les décisions finales. Au point de vue financier, la Sangha est solidement établie, bien que ses recettes viennent principalement de dons.
On peut donc dire que la Sangha est en de bonnes mains et quelle continuera pendant longtemps, sauf imprévu, à fonctionner pour propager le message de Mâ. L'enseignement de Mâ est entièrement fondé sur l'ancienne tradition des Véda et sur l'hindouisme (ou plutôt le sanâtanadharma, la « religion éternelle », comme les hindous appellent leur propre religion) dans son aspect traditionnel et orthodoxe ; et la structure des ashram et des temples forme une sorte de forteresse destinée à protéger cet enseignement. La culmination de cet enseignement, son centre vivant, est le Védânta, et c'est cette partie du sanêtana dharma qui est destinée aux disciples occidentaux.

L'attachement qu'ont gardé certains anciens disciples à la forme physique de Ma n'est-il pas un voile devant la lumière que Ma peut nous donner ?

L'attachement à la forme physique d'un sage parfait, ou sad-guru, est très différent de celui qu'on peut avoir pour une personne ordinaire. Le sad-guru est appelé gyanamûrti, l'incarnation de la Connaissance. Sa forme est en quelque sorte une cristallisation de la Conscience-Bonheur omniprésente. Une relation de dévotion avec cette forme amène tôt ou tard a l'omniprésent qu'elle représente.
Pour ceux qui sont capables de méditer d'emblée sur l'omniprésent, I'attachement à la forme n'est peut-être pas nécessaire ; mais pour ceux qui ont goûté à l'amour merveilleux pour leur guru, la transition du personnel à l'impersonnel se fait tout naturellement. L'amour personnel envers le guru ne pourra disparaître que quand il y aura une fusion totale avec ce que le guru symbolise. L'amour pour la personne du sad-guru est indélébile. Ma disait: « Ceux qui ont aimé ce corps (elle-même) ne serait-ce qu'une fois ne pourront jamais l'oublier, quels que soient les efforts qu'ils fassent pour l'éradiquer de leur cœur ».

Vous avez dit que ce qui plairait le plus à Mâ durant cette année du centenaire (1995-1996), c'est que chacun de ses disciples choisisse un yama et décide de l'observer parfaitement pendant toute l'année. Pouvez-vous développer ce point ?

Les cinq yama représentent la première étape de l'ashtângayoga, le yoga en huit étapes tel que le décrit Patanjali dans les Yoga sûtra. Ce sont les fondations de la vie spirituelle. Ces yama sont:- ahimsâ, non-violence - satya, dire la vérité - astéya, honnête - aparigraha, absence d'avidité,- brahmachârya, chasteté. Ces yama mènent à une perfection morale, car ils doivent être observés jusque dans leurs aspects les plus subtils. Par exemple, dire une parole dure est un acte de himsâ (violence); ou bien, une simple expression du visage qui sciemment tente de dissimuler la vérité peut être considérée comme un mensonge subtil.
Patanjali indique aussi, à part la purification du mental, le pouvoir psychique que donne l'observation de chaque yama. Ainsi, si on observe la vérité à la perfection pendant douze ans on obtient ce qu'on appelle le vâk-siddhi: chaque parole qu'on prononce devient vraie. Si l'ahimsâ (non-violence) est observée strictement, personne ne pourra vous faire du mal et les animaux féroces seront devant vous comme des moutons.
Les cinq yama observés parfaitement à eux seuls peuvent donner la réalisation, par la purification du mental qu'ils produisent. Ma attachait une grande importance à l'observation stricte de ces règles morales, et j'ai pensé que si quelques-uns de ses proches faisaient le voeu d'observer à la perfection au moins l'un de ces yama, ce serait la meilleure preuve d'amour et de vénération qu'on pourrait donner à Ma à l'occasion du centenaire.

N'y a-t-il pas corrélation entre les trois yama: ahimsâ, satya et astéya, qui ainsi ne font qu'un ?

Les yama sont des règles morales, bien sûr, mais ils font partie du tempérament sattvique, c'est-à-dire qu'une personne dont le mental est très sattvique suivra spontanément les yama sans aucun effort. En ce sens, ils sont reliés. Dire toujours la vérité peut entrer en conflit avec le vœu d'ahimsâ, car certaines vérités peuvent quelquefois faire beaucoup de mal. Dans la Loi de Manu il est dit qu'il faut toujours dire la vérité, mais qu'il faut s'abstenir (c'est-à-dire se taire) s'il s'agit de paroles dures ou blessantes. C'est bien ce que vous voulez dire, je pense, quand vous parlez d'une corrélation entre ces yama. De même, être honnête, c'est ne pas mentir puisqu'une personne malhonnête devra automatiquement mentir pour cacher son larcin. Et voler, c'est faire du mal à quelqu'un, c'est-à-dire un acte de himsâ.

Comment discerner l'attitude juste entre effort et abandon ?

L'abandon total, I'âtmani-vedan, est très difficile. Je cite une très belle définition de cette attitude par Nisargadatta Maharaj : « Bien sûr, quand il y a un abandon total, un complet renoncement de tout souci au sujet de notre vie passée, présente ou future, de notre sécurité physique et spirituelle, et de notre respectabilité - alors, une nouvelle vie commence, pleine d'amour et de beauté. » Mais qui donc est capable d'avoir une telle attitude ?
Nous faisons toutes sortes d'efforts pour notre vie physique, pour protéger notre corps, notre mental, notre position sociale, nos proches, etc. Ces efforts doivent être déviés vers la recherche du Divin: méditation, purification mentale, etc. Cela s'appelle purushârtha, I'effort vers le Divin. Ces efforts doivent être faits au maximum de notre capacité, mais il faut savoir que notre pouvoir est très limité, et que c'est le Divin (le guru) qui complétera notre effort. C'est quand on a épuisé toute notre capacité d'effort, et qu'on se rend compte qu'on est incapable d'obtenir son fruit, c'est alors que vient le véritable abandon.

Comment savoir où est notre juste place ?

Du point de vue de l'âtman, vous êtes omniprésent, et là il n'est plus question de place. En ce qui concerne la conscience individuelle, le jivâtman, il est toujours « tel qu'en lui-même », il est toujours le même, quelles que soient les modifications du corps, du mental ou de l'entourage. La question de savoir quelle est notre juste place ne se pose que quand le mental se met à fonctionner et s'imagine qu'il peut diriger les événements.
En réalité, c'est le Pouvoir divin qui agit et nous fait aller d'une place à l'autre. Notre juste place est donc de s'abandonner consciemment au Pouvoir divin sans pour cela perdre notre responsabilité. C'est comme un bon nageur qui se laisse emporter par le courant sans perdre pour autant l'initiative.

Vous avez écrit récemment : « La culmination de l'enseignement de Mâ est le Védânta ». Pouvezvous développer les aspects plus spécifiques de son enseignement ?

L'enseignement de Mâ peut se résumer dans une phrase qu'elle disait souvent : " Trouver Bhagavan (Dieu), c'est trouver son propre soi, et découvrir son propre soi, c'est trouver Dieu." C'est-à-dire que si vous partez à la recherche du Divin (par la voie de la dévotion), vous finirez par trouver que ce Divin réside dans votre propre cœur ou qu'il est de la même nature que l'omniprésent.
Et si vous commencez par la recherche du « Qui suis-je en réalité ? » (la voie de la Connaissance), le Divin se révélera comme étant votre propre nature. Pour arriver à cette Connaissance, il y a de nombreuses voies, et c'est cela qu'on appelle une sâdhanâ. Mâ guidait chacun dans la voie qui lui convenait le mieux, et n'imposait pas une ligne de sâdhanâ particulière, mais le but final était la découverte du fait que l'âme individuelle n'est pas différente du Divin Omniprésent. Et c'est cela l'essence du Védânta.