Chapitre VII
Conjiveram
Accompagné d’un guide, je visite la célèbre « Benarès du Sud ». Conjiveram laissera peu de place dans mon esprit. La ville et le temple me semblent déserts et sans vie. J’ai presque l’impression de visiter d'anciennes ruines. Pourtant les hindous du Sud attachent à ce lieu autant de sainteté qu’à Benarès. Peut-être mon esprit est-il dans un état dépressif. On ne trouve dans les objets du monde que ce qu’on y apporte. Notre affectivité est basée avant tout sur le fonctionnement de notre corps. Pour le jeune homme en bonne santé, le monde est plein d’espoir et de beauté. La vie lui semble valoir la peine d’être vécue. C’est parce que son organisme neuf fonctionne bien et que les sensations cénésthésiques qui viennent en surface de la conscience sont pour la plupart euphoriques.
Quand aux vieillards, ils sont presque toujours mécontents, « ronchonneurs ». Il leur semble que tout va mal, que la société est à la veille de la catastrophe, que les gens empirent de jour en jour. « Ah ! De mon temps ! » disent-ils. Ils sont très rares à se rendre compte que s’il leur semble que tout va mal c’est que leur organisme, comme une vieille machine, a des ratés partout. La catastrophe mondiale qu’ils redoutent n’est que l’objectivation des signes avant coureurs de la mort de leur corps. Les gens n’empirent pas de jour en jour, mais ce sont les organes des sens du vieillard qui se détériorent et sa faculté de jouir des plaisirs du monde qui s’estompe de plus en plus.
La ville religieuse de Conjiveram est divisée en deux parties. L'une dont les temples sont consacrés à Vishnou et l’autre à Shiva.
Dans un des temples, j'ai fait la rencontre d’un Sadhu au visage avenant. Il parlait assez bien l’anglais et a engagé la conversation. Il a parlé de religion, de choses banales. Puis il m’a donné un MANTRA, une formule sacrée et m'a indiqué la manière précise de le moduler.
Enfin, il m’a demandé une pièce de quatre annas que je lui ai donnée de grand cœur.