Jay Mâ n°46
(1997)
Paroles de Mâ
(A propos de la prière) : 'jitna bhav, itna labh' 'tel est le sentiment, tel est le bénéfice'.
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Tout ce qui existe n'importe où en ce monde, que ce soit les arbres ou les plantes, les insectes ou les reptiles, ou tout autre être vivant, leur naissance est en fait votre naissance, et leur mort est en fait votre mort. Au niveau où tout est contenu en vous et vous êtes présents en tout, il y a seulement le Un.
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Guru signifie 'gurutva', la pesanteur, la gravité qui est attachée au Divin. Lui seul est guru, ou uniquemet celui qui Le connaît. L'initiation signifie que c'est uniquement le guru ou la divinité d'élection qui se manifeste, car le mantra, le guru et la divinité, tous ne font qu'un.
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Qui est guru? Non seulement le père et là mère mais aussi celui auprès duquel nous obtenonsune connaissance sur des sujets secrets (gur). Tous ceux-ci sont gurus. Celui qui nous indique un tant soit peu le chemin est aussi guru.
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Poursuis la pratique du Nom en l'associant à la respiration. Cet exercice induit un état de stabilité dans le mental. De plus, ce souffle (prâna) qui est en nous recouvre le monde entier. Quand on pénètre au coeur de cette grande expérience (mahan bhav), c'est cette source elle-même qui nous attirera à elle. Essaie d'arriver au moment où tu plonges dans cette source.
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Il faut empêcher le 'renforcement' ('khurak' signifie la nourriture mais aussi la dose de médicament ou le rappel de vaccin) de la tendance à l'extériorisation vritti) et favoriser le renforcement de la tendance à l'intériorisation. En effet, les tendence que vous renforcez deviendront un jour si puissantes que vous ne pourrez plus les arrêter. Ce sont elles qui vous mettront dans un état d'impuissance, c'est pourquoi on dit qu'il faut décourager l'extériorisation et renforcer l'intériorisation.
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Certes, c'est le monde, c'est pour cela qu'il y a des difficultés, quand on va vers le monde on est obligé d'avoir des difficultés. Savez-vous ce que sigifie aller vers le monde? Cela revient, après s'étre blessé, à ouvrir encore plus la plaie. D'autre part, aller vers Dleu signifie mettre un pansement sur cette plaie. C'est le lien même avec le monde qui est source de difficulté...Le samadhi aussi est un stade : quand vous faites une longue route, vous sentez de vous arrêter un peu pour prendre du repos, Mais une fois que vous êtes arrivés à la maison, que vous êtes à l'étage ou sur le toit, vous n'avez plus besoin de vous reposer; la question de détente et de fatigue ne se pose plus.
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Vous n'avez pas le droit de dire 'c'est Dieu qui fait tout, il est présent en tout lieu'. Il arrive un état où l'on expérimente vraiment qu'il fait tout, qu'il est avec vous partout. Tout ce que vous dites vient d'une connaissance livresque ou par ouie-dire.
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Sans une forme divine (sakar), vous ne pouvez aller vers le Sans-forme (nirakar). On va vers le Sans-forme en passant par l'intérieur de la forme. De même, nous allons au Gange en passant par un chemin, c'est à dire par une forme; en suivant celui-ci, on parvient au fleuve. A ce moment-là, la forme ne tient pas plus que la boue sur les pieds. Et puis quand on sort de là, regardez!. tout est Cela, que ce soit la forme ou le Sans-forme.
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QUESTIONS A VIJAYANANA
Q : Est-ce qu'on peut considérer la colère comme une drogue? Comment la dépasser?
V : Le mécanisme psychologique de la colère est le suivant : le point de départ est toujours une sensation pénible venant de notre corps qui nous met mal à l'aise. La tendance instinctive est de nous en libérer au plus vite et de revenir à un état d'euphorie. Ces sensations ne sont pas en général dans la conscience claire, et le mental cherche une cause dans le monde extérieur à laquelle il pourrait attribuer ce malaise, et en détruisant cette cause, il espère retrouver son équilibre. Survient tout à coup un individu qui vous insulte ou se conduit d'une manière grossière. ça y est! C'est lui, la cause de mon malaise!
Le mental fait alors appel à cette énergie de base toujours présente dans le muladhara et la transforme en une force destructrice qu'on appeIle colère. Il la dirige vers l'ennemi. Le malaise étant projeté vers l'extérieur disparaît du champ de conscience clair. L'énergie libérée momentanément lui donne une impression agréable de puissance, mais quand la crise de colère est passée, elle est remplacée par une dépression et l'état de malaise redevient conscient.
Une autre crise de colère et le même processus a lieu. Il se crée donc une association d'idée entre les malaises et la colère qui les soulagent pour un moment. II y a alors chez certaines personnes une addiction aux crises de colère où ils trouvent une euphorie relative et une impression de puissance. Naturellement, il y a tout le mauvais karma qu'on a créé dans ces colères et qu'il faudra payer par d'autres souffrances. Comment se guérir de la colère? Tout d 'abord, bien prendre conscience du mécanisme de projection d'une sensation pénible vers un objet extérieur. Et aussi comprendre tout le mal qu'on fait aux autres et à soi-même quand on se met en colère. La colère, comme disent les Ecritures, est une des portes de l'enfer.
Q :Quel est le rapport du mariage et de la vie spirituelle?
Pour ceux qui veulent atteindre le sommet de la voie spirituelle (moksha, nirvana, illumination, Réalisation du Soi), une chasteté parfaite est indispensable, mais ceux qui veulent et peuvent atteindre cet état sont très rares. La voie du célibat est donc une voie d'exception. C'est pourquoi les grands sages ont établi et enseigné des voies progressives qui permettent à la personne ordinaire d'aller d'étape en étape, jusqu'à ce qu'elle ait assez de maturité pour aborder le grand problème qu'est la découverte de la Réalité suprême, et le mariage est une de ces étapes. L'énergie sexuelle chez l'être humain commun doit être canalisée, puis être sublimée et divinisée. Les rapports entre un homme et une femme font partie de la nature, mais de la nature grossière (la prakriti inférieure). Il existe un niveau où cette union se fait au niveau de la pure conscience sans contact physique. Dans le mariage physique l'homme doit considérer sa femme comme un aspect de la Mère divine, et la femme doit voir dans son mari le Divin masculin. Ainsi pourra se développer un rapport d'amour et de respect mutuel qui pourra les préparer au véritable amour qui est impersonnel. Et les rapports sexuels doivent être aussi rares que possible afin de conserver une précieuse énergie qui pourra les aider à atteindre le Suprême quand le moment sera venu.
Q : Dans les pays riches comme la France et La Suède, le taux de suicide est beaucoup plus élevé qu' en Inde; Pourquoi cela?
V : La personne qui se suicide le fait pour echapper à la souffrance soit physique soit le plus souvent mentale. Une personne qui va se suicider (à moins que ce soit un aliéné mental) a longuement réfléchi avant de prendre cette décision. Ce sont en général des athées nourris par la philosophie existentialiste qui pensent qu'après la mort c'est le grand néant. Ce type est commun en Occident; en Inde, les véritables athées sont trés rares. Chaque hindou a quelque part dans son subconscient la croyance en un Pouvoir divin ou au moins que chaque action produit un karma, qu'il y a des vies futures conditionnées par les actes que l'on fait. Le suicide est considéré comme un crime, et il est censé produire des renaissances trés fâcheuses. Le suicidé, dit-on, devient un preta, un fantôme très misérable qui a toujours faim et soif et a une bouche trop petite pour satisfaire ses besoins. Quand ces croyances vous ont été inculquées dès l'enfance, on réfléchit à deux fois avant de mettre fin à sa vie.
Q : Vous dites que si les bhaktas de Ma avaient eu plus d'intensité, elle aurait pu rester plus longtemps dans son corps; pourtant, quand on voit des films de bhajans en sa présence, n'avait-on pas l'impression qu'ils avaient beaucoup d'enthousiasme pour chanter avec elle?
La vidéo que vous avez vu et entendu ne représente qu'un court moment d'enthousiasme. Ce qui est important, c'est la conduite dans la vie de tous les jours : la droiture, l'honnêté et surtout la sincérité dans la recherche de la Vie divine.
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EXTRAITS DU JOURNAL DE DIDI
12 juin 1959
Un fidèle arriva avec son épouse et sa belle-fille. C'était une personne qui était vanaprasthi (le stade intermédiaire entre la vie de famille et le sannyas); sa belle-fille elle aussi avait l'intention d'embrasser ce type de vie. Elle semblait être dans un état particulier; en tout cas, son beau-père ne tarissait. pas d'éloges à son propos. Il disait que leur Gourou qui vivait à Bénarès avait déclaré, en la voyant, qu'elle avait un niveau spirituel élevé. Il désirait connaître l'opinion de Mataji à ce propos.
Ma demanda à la jeune femme :'Quelles sont tes expériences quand tu médites?' Elle répondit :'Tout d'abord, je sens une félicité intense, et à la fin de même' répliqua-t-elle, ' et rien du tout entre les deux'.
Mataji expliqua au beau-père :'C'est encore un stade élémentaire. Vous pouvez le comprendre de vous même : tant que le mental-ego persiste, il ne peut y avoir de samadhi. Néanmoins, on peut dire que son mental et son corps ont atteint un certain degré de calme. Quant elle dit 'Ensuite, rien du tout ,' qui est celui qui expérimente tout cela ? C'est le mental individuel qui est actif, il n'y a pas de Samadhi.
Après quelque temps, Mataji poursuivit :'Quelqu'un d'autre vint aussi à ce corps, en déclarant qu'il n'avait plus aucun intérêt dans quelque travail ou occupation que ce soit, puisque son esprit était absorbé en samadhi et que son pouvoir de Kundalini s'était éveillé. En parlant, il utilisait fréquemment les mots 'je' et 'le mien'. II a eu l'occasion de comprendre juste à ce moment-là qu'on ne pouvait parler de samadhi tant qu'il y avait 'je' et 'le mien'. Dans le samadhi réel, rien de tout cela ne survit. Regardez, la mangue qui est mûre sur l'arbre n'appelle pas à grand cris :'Je suis mûre, venez et prenez-moi!' Si personne ne la cueille, elle tombe d'elle-même sur le sol. Voyez-vous la beauté de cela? Elle retourne à la place même d'où elle est venue.'
Extraits du Volume VI
(traduction anglaise parue , cette année)
10 décembre 1937
Ma poursuivit 'Le coeur est le siège de toutes les expériences, heureuses ou malheureuses. C'est en fait l'asana (siège et aussi tapis pour la méditation) de Dieu lui-même. Si la personne à laquelle l'asana appartient n'y est pas assise, on ne peut obtenir de paix permanente. Si on y installe une autre entité, cela ne peut mener qu'à l'inquiétude et l'instabilité, car elle ne sera pas capable de maintenir le caractère sacré du pur asana. Cela aboutit aux allers et retours (de naissance en naissance). C'est pourquoi il est particulièrement avantageux pour nous d'installer Celui auquel l'asana appartient de droit.
Il est en fait toujours assis sur cet asana et le but de notre sadhana est d'essayer de Le manifester. Quand ceci arrive, nos conditionnements (samskaras) liés à la notion d'individualité disparaissent, on atteint le chakra situé entre les sourcils et la forme brillante avec tant de couleurs s'épanouit.
Ma rit et dit, 'Savez-vous ce que j'ai vu? C'était comme un système d'irrigation, quand vous versez l'eau dans un canal, elle s'écoule par d'autre canaux jusqu'à un grand réservoir éventuellement qu'elle remplit, et tout ceci naturellement. De même qu'un fleuve s'écoule vers l'océan, de même c'est la règle que la kundalini shakti aille seulement vers le haut à partir du muladhara d'une place à l'autre, progressivement, du premier. chakra au second, etc jusqu'au moment où elle atteint le sahasrara."(p.5)
Après un long intervalle sans kriyas (manifestations visibles de l'extase), Ma de nouveau rentra en transe pendant un kirtan. Jyotish Dada (Bhaiji) lui demanda :'On dit que certains kriyas sont apparus pendant une phase précédente de votre existence, et ensuite il y a eu de grands changements dans votre état. Pourquoi donc ces kriyas reviennent-ils-maintenant ?' Ma répondit : 'Vous pouvez poser ce genre de questions, mais savez-vous ce qui arrive à l'intérieur d'un sadhaka? Chaque état est remplacé par un autre et un progrès régulier s'ensuit; mais dans le cas de ce corps tout est différent, c'est pourquoi tout apparaît sens dessus-dessous et l'écoulement se fait au hasard. Il se peut qu'à vos yeux un kriya associé avec un état très élevé se manifeste dans ce corps et que plus tard, vous observiez un kriya plus ordinaire. Dans ce corps, il n'y a rien d'élevé ou de bas. Quelque soit le besoin de vous, les gens, à un moment donné, ce corps agit en fonction pour y répondre.
Je posais la même question que Bhaiji plus tard; et Ma me répondit de façon similaire; quand je l'interrogeais sur l'éclat de son corps, elle dit : 'Savez-vous ce que j'ai observé à certains moments? C'était comme si ce corps était la lumière personnifiée; et l'endroit où je me trouvais était inondé par la même lumière.'
Ma s'est réveillée aujourd'hui à environ dix heures. On a lavé son visage et ses mains. Elle s'assit sous un arbre et je m'assis auprès d'elle. Après avoir entendu dire qu'elle était arrivée, de nombreuses personnes vinrent pour lui présenter leurs respects (littéralement : 'prendre la poussière de ses pieds) et lui faire pranam. J'étais en conversation avec elle. Nous en vînmes à parler des shastras (écritures sacrées). Ma dit :'Savezvous ce que sont les shastras? 'sva astre', cette arme (astra) qui peut couper les liens qui attachent au monde.' Ensuite on en arriva à la question de savoir quelle était la signification du mot 'shishya' (disciple) Ma dit :'Sva, Éva, c'est à dire établir sa personnalité réelle, expliquer la nature véritable qui est indivisible, c'est à dire la révéler. 'Shasya' signifie semer une graine et cultiver une plante (shasya). Cela revient à planter une graine, faire pousser la plante et révéler la nature du fruit.' En entendant tout ceci de la bouche de Ma, un chant me revint à l'esprit :
'Mon re krishi kaj ja no na.
Emon manob jomin roilo potit
abad korle pholto shona.'
c'est à dire : 'O mental, tu ne connais pas l'art de la culture. Ce terrain excellent d'une naissance humaine est en jachère. Si tu le labourais, il produirait de l'or.' Nous allâmes nous coucher vers deux heures du matin.
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LA RECONNAISSANCE DU SEIGNEUR
Pratyabhijrna, ou la reconnaissance du Seigneur, est une notion centrale du Shivaïsme du Cachemire, une école qui a d'abord été illustrée par Utpaladeva (cf ses hymnes à Shiva, un bel exemple de dévotion débouchant sur la non-dualité, publiées par A.Maisonneuve) puis s'est épanouie avec Abhinavagupta (Xe-XIe siècle). Ce dernier a écrit un commentaire (vimarsini) sur des versets d'Utpaladeva à ce sujet. Colette Poggi nous a envoyé des pages de sa thèse de doctorat en philosophie où elle traduit ce texte; nous reproduisons les derniers versets de l'ouvrage. Colette, une lectrice de Jay Ma, vient de retravailler ce texte pour la collection 'La Pléïade' qui prépare une publication sur les philosophes indiens. Ceux qui veulent en savoir plus sur Abhinavagupta peuvent se référer aux ouvrages de Lilian Silburn (Paramarthasara chez de Boccard par exemple). L'histoire classique qui illustre la reconnaissace du Divin est celle du prince qui est enlevé bébé par des voleurs. Quand il est adolescent, les ministres du roi le retrouvent élevé par une famillle pauvre dans la forêt. Pour ne pas le choquer, ils ne lui disent rien mais l'engagent au palais dans un emploi peu élevé, puis petit à petit le font progresser jusqu'à ce qu'il devienne le serviteur particulier du roi; à ce moment-là, il est devenu mûr pour la 'reconnaissance' et ils lui révèlent la vérité.
Verset 1 (d'Utpaladeva) : Seul le Seigneur suprême et unique est le Soi intime de tous les êtres vivants, il est pleinement imprégné de cette prise de conscience exempte de dualité "Je suis l'essence universelle ! ''
verset 15 : Ayant acquis une parfaite conscience du Soi, de ses énergies de connaissance et d 'action, les ayant reconnues identiques à son propre soi, ainsi cet être réalisé agit à son gré et connaît tout ce qu'il désire.
Sachant que le Soi a pour essence Shiva, que les énergies de connaissance et d'action se ramènent en fait à sa liberté suprême, et que celle-ci ne fait en fait qu'un avec Lui, il réalise qu'il est le Soi, et non tel principe qu'évoquent les Kanadas.. Il prend conscience que les énergies. de connaissance et d'action ne sont pas distinctes du Seigneur. Se consacrant alors de tout son Coeur à l'absorption (samavesha) il est capable de faire et connaître tout ce qu'il désire, alors, même qu'il est lié à un corps. Celui qui cependant n' adopte pas cette attitude est délivré de son vivant, mais ne devient le Seigneur suprême qu'une fois la mort venue.
Même si l'expérience personnelle (svapratyaya) tient dans ce domaine une place importante, on considère néanmoins que (la transmission de) l'enseignement, sauvegardée par la lignée des maitres (guruparampara) doit venir confirmer celle-ci; l'intelligence des traités (shastradrishti) a été ainsi considérée comme critère essentiel de qualification (adhikara) dans le livre des Agamas (écritures sacrées shivaïtes du Moyen-Age). Cet enseignement se fonde donc à la fois sur le maître, les traités et sa propre expérience. L'auteur indique ainsi quelle est, dans cette école, la lignée des maîtres.
Verset 16 - Ainsi cette nouvelle voie est aisément praticable; je la révèle ici telle qu'elle fut naguère évoquée par notre vénéré maître dans le traité intitulé 'La vision de Shiva' (Shivadrishi). Quiconque, de ce fait, s'engage sur ce chemin et se reconnait soi-même créateur de l'univers parvient à la réalisation (siddhyati) sitôt qu'il pénètre le domaine indifférencié qu'est l'état de Shiva (shivata).
Voie méconnue, enfouie au coeur de tous les textes sacrés, et de ce fait restée secrète, cette (approche) toute nouvelle (abhinava) apparaît aisée car dénuée des tourments (klesha) liés aux pratiques internes et externes telles que le contrôle du souffle (pranayama), etc...C'est ainsi que l'évoque l'excellent et illustre maître Somananda dans son traité intitulé 'Vision de Shiva'. Et nous avons tenté, tout au long de cet ouvrage, de mettre en lumière le contenu de son enseignement, chassant les doutes et repoussant les objections émises à son encontre par les protagonistes des autres systèmes. En vérité, la teneur de cet enseignement trouve un écho favorable auprès de maîtres divers, en de nombreux textes sacrés, et se vérifie égalemet à l'épreuve de notre expérience personnelle! (Fort de cette foi en notre traité) l'aspirant fervent focalise toute l'énergie de la conscience sur le sens de ses propos, et réalise qu'il détient en soi la souveraineté (aisvarya) caractérisée par l'efficience cosmique (vishvakartritva); grâce à cet élan d'adhésion totale et à travers cette prise de conscience (paramarsha) il devient libéré-vivant (jivanmukta) et le Seigneur Shiva en personne. Voici à ce propos quelques versets du maître extraits de la Shivadrishti :
''Lorsqu'on sait, grâce à une conscience (pratipati) inébranlable, l'essence de Shiva présente en tout ce qui existe, à quoi bon avoir recours à la contemplation (bhavana) ou à tout autre moyen? Sitôt l'or connu, a-t-on encore besoin de l'évoquer (bhavana) ou de quelqu'autre investigation? Cette connaissance-là, en effet, est irréfutable, à l'image de celle que nous avons de nos parents!"
Ayant ainsi réalisé son identité à Shiva, si l'on demeure à jamais imprégné de cette réalité et que l'on y plonge la triade complète composée du corps et du souffle, de l'intellect et du vide (shunya, cad le monde des objets non-sensibles), ou bien deux sinon un seul de ces éléments, on a alors accès à l'intégralité des pouvoirs surnaturels (vibhuti) et même au suprême (parivibhuti)
Verset 17 - Même si elle se tient auprès de ce bien-aimé dont elle a enfin gagné la faveur au prix d'infinies prières, cette présence ne comblera pas de joie celle qui l'attend aussi longtemps que cette jeune femme ne l'aura pas reconnu d'entre les hommes ordinaires !
Ainsi, à l'image de ce héros dont les vertus passent inaperçues, le Seigeur universel, essence de toute chose, n'apparaît pas dans sa gloire innée.
Une jeune femme sent grandir en elle un puissant amour pour un héros dont elle a appris les (merveilleuses) qualités. Pleine de désir pour lui, aspirant par-dessus tout à le rencontrer, elle se montre impuissante à maîtriser les élans de son coeur; nuit et jour, elle implore les dieux, demande des messagers qui emportent vers l'aimé ses lettres et lui révèlent le trouble profond qui la tourmente. Elle ne quitte plus le seuil de sa demeure, et son corps de jeune liane, éprouvé par un éloigement trop cruel, se dessèche. Mais cédant enfin à ses prières et à son désir, voici que ce héros soudain se tient devant elle; mais bien qu'elle regarde son bien-aimé, elle ne le distingue aucunement des hommes ordinaires, car elle n'emprunte pas la voie de la prise de conscience (paramarsha marga) (qui lui révèlerait) l'excellence de ses qualités. Ainsi sa vision, bien qu'effective, ne comble pas son coeur!
Il en va de même pour le Seigneur, Soi universel, car, bien qu'il resplendisse sans trêve, ce rayonnement (nirbhasana) ne comble pas de plénitude le coeur des hommes. Il ne réalisent pas en effet que ce Soi détient la souveraineté ultime (paramaishvarya) caractérisée par sa propre énergie de connaître, d'agir, etc... dénuée d'obstacles et universelle; de même, tout ce qui existe, jarre, etc..., brille (non distinct du Soi).
Mais, lorsque soudain, sur une parole (du messager) ou par la reconaissance d'une caractéristique du héros ou à l'aide d'un autre moyen peut-être, la jeune femme prend enfin parfaitement conscience des qualités éminentes du héros (qui se tient devant elle) comme étant celles-là mêmes de son bien-aimé, alors en un instant cette subite réalisation fait s'épanouir son coeur et la comble de plénitude. Ainsi, grâce au plaisir renouvelé de l'union, elle accède à la quiétude et aux autres (saveurs de l'apaisement).
De même, lorsque dans son coeur on identifie son propre soi à la sublimité de Seigneur suprême grâce à la parole du maître, ou la reconnaissance (abhijnana) de traits caractéristiques (qui lui sont propres telles) les énergies de connaissance et d'action etc..., alors survient à cet instant la libération dans la vie (Jivanmukti) qui est la plénitude même. Par la saveur réitérée de l'absorption (samavesha), l'on accède aux pouvoirs divins (vibhuti). Seule la reconnaissance du Soi est donc à l'origine des perfections surnaturelles (siddhi), inférieures et supérieures.
Ce traité (shastra) est un bienfait ineffable accordé à tous les hommes car il offre le fruit suprême (mahaphala). Souhaitant éveiller chacun
à la reconnaissance et éveiller la confiance envers cette voie par la remémoration des qualités éminentes qui en résultent, ainsi que du nombre important d'êtres pleinement réalisés (prasiddha) qui l'ont empruntée,l'auteur cite le nom de son père en conclusion :
verset 18 - Voici la Reconnaissance du Seigneur, composée par Utpaladeva, fils d'Udayakara, afin que chacun accède sans effort (ayatna) à la Réalisation (siddhi, avec ses deux sens de pouvoirs surnaturels et de Réalisation complète).
Traduit de sanskrit par Colette Poggi
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LE MARCHAND ET SES TROIS FILS
Conte du sud de l'Inde
Il était une fois un marchand qui avait trois fils. Sentant sa fin prochaine, il appela et leur dit : je lèguerai mon commerce à celui d'entre vous qui saura le plus faire preuve d'intelligence. L'épreuve consiste à remplir complètement une pièce en dépensant le moins d'argent possible.
Le premier fils remplit une pièce entièrement de coton : lorsqu'il ouvrit la porte, le père ne fut pas convaincu. Le second fils en remplit une autre de paille, qui tomba sur la tête du père quand ce dernier ouvrit la porte; il ne fut pas non plus convaincu. Le troisième fils ramassa sur le bord de la route un tesson de poterie et un bout de ficelle, acheta pour un dixième de roupie d'huile, constitua une petite lampe et l'alluma au milieu de la chambre obscure, si bien qu'elle était remplie de lumière quand le père en ouvrit la porte. Ravi, le vieil homme confia son héritage au troisième fils.
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LA COMPASSION DE MA A TRAVERS SA CORRESPONDANCE
(Raconté par Rajat Rumar Narayan le soir de Guru Purnima)
Rana Gosh, le fils de Shailen Gosh, un ancien fidèle de Ma trés connu à Calcutta, partait faire des études en Occident pour environ deux ans. Au moment de prendre la bénédiction de Ma, celle-ci lui dit 'Ecris-moi toutes les semaines.' 'Ma, je vais sans doute être à court de choses intéressantes à raconter!' 'Ce n'est pas grave, parle-moi de ta vie, de ce que tu penses, de ce que tu manges, dis-moi ce que tu veux mais écris-moi toutes les semaines.'
Et la chose étonnante, c'est que Ma lui a aussi répondu toutes les semaines, ce qui fait que Rana a une collection d'environ 108 lettres dictées par Ma. L'autre chose étonnante était que lorsqu'une réponse de Ma 'arrivait', c'est à dire environ trois semaines après avoir été écrite, il y avait dedans la solution de problèmes qu'il se posait au moment même ou dans les jours juste précédents. Maintenant encore, il reprend ces lettres de Ma et trouve des solutions à ses problèmes actuels.
En 1981, ma mère (elle-même la fille de Bajaj, qui a connu Ma, était trésorier du Congrès et parmi les proches de Mahatma Gandhi) avait 65 ans environ. Sa santé n'avait pas été bonne dans les années précédentes, et elle a fini par avoir une occlusion intestinale à cause d'adhérences dues à une tuberculose de la région. C'était une urgence chirurgicale, on a ouvert l'abdomen, retiré cinq litres de liquide d'ascite, vu qu'on ne pouvait pas opérer l'intestin lui-même qui était trop atteint, et on a refermé. A ce moment-là, Ma était à Naimisharanya où il n'y avait pas de téléphone. J'ai quand même réussi à joindre un opérateur qui habitait à trois kilomètres de là où se trouvait Ma et qui a été faire la Commission à Bhaskarananda. Ma a répondu un télégramme où elle disait comme à son habitude dans ces cas-là :'Faites le meilleur traitement et priez Dieu.' Peut-être avait-elle ajouté 'Tenez-moi informée'. Pendant les vingt jours post-opératoires où l'état de ma mère restait grave, j'ai envoyé à Ma un télégramme quotidien. Cinq jours après l'intervention, les intestins ont recommencés à fonctionner, les médecins ont dit que c'était un miracle, et finalement elle s'en est sortie. Elle est toujours bien vivante et va fêter ses 80 ans le mois prochain.
Ma, j'ai entendu dire qu'il est nécessaire de tester le Guru et que le disciple doit aussi être testé par le Guru. Avant même que la question ait été complètement énoncée, Ma répliqua 'Savez-vous comment c'est? C'est exactement comme on examine le gendre avant de lui donner la fille en mariage. Une fois que le mariage est célébré, on est supposé ne plus poser de questions'.
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ENTRE REVE ET REALITE
Pensées extraites du Yoga-Vasishta
Introduction
Le Yoga-Vasishtha est un texte médiéval indien qui présente l'enseignement du sage (rishi) Vasishta à Rama adolescent, celui-ci étant un avatar, c'est à dire une descente du divin venue sur terre pour rétablir la loi juste, l'ordre du monde (dharma). Il est intéressant de noter qu'en Inde, même des avatars comme Rama et Krishna jouent le jeu du disciple pour s'adapter à la société et à la culture dans laquelle ils sont venus.
La première partie de l' ouvrage est une longue réflexion de l'adolescent Rama frappé par l'absurdité de l'existence, et se mettant à chercher un sens. Par son discernement aigu, il développe un intense sens du détachement. Il conclut en demandant à Vasishtha qui l'écoutait avec toute la cour :'Qui sont ces héros qui le sont libérés de l'illusion? Et quelles méthodes ont-ils adopté pour se libérer? Si vous considérez que je suis ni compétent, ni capable de comprendre cela, je vais jeûner jusqu'à ce que mort s'ensuive." (I, 31) Vasishtha et toute la cour louent l'intensité du jeune prince, et à partir de là commence l'enseignement à proprement parler.
Une ides fondamentale du texte, c'est que le monde est un rêve, et que seule la Conscience absolue peut être considérée comme réelle. En philosophie, on appelle ce point de vue le subjectivisme absolu. Cette doctrine est directement influencée par l'école bouddhiste du vijnanavada. C'est en quelque sorte une exagération du védanta classique de Shankarâcharya, qui ne va pas jusqu'à dire que tout est rêve, mais qui dit simplement qu'on ne peut affirmer formellement ni l'existence, ni la non-existence du monde tel qu'il nous apparaît. Pour le sage, cette question reste comme en suspens. Au départ, le chercheur spirituel est influencé par le matérialisme environnant, et cette méditation consistant à voir le monde comme un rêve est une étape permettant de le déconditionner de cette influence. Si un carton est plié dans un sens, on le plie complètement dans l'autre sens pour que finalement il redevienne droit.
Cet enseignement non-dualiste est considéré dans la tradition indienne comme le couronnement de toute une évolution qui passe par la pratique des rituels, une vie religieuse et le plus souvent l'expérience durant de nombreuses années de la dévotion à un Dieu personnel. Il s'agit d'un enseignement élevé, nécessitant en pratique une préparation pour être réalisé. Cependant, une vision intellectuelle claire du but non-duel de l'évolution intérieure est une grande aide même pour le débutant.
L'enseignement est illustré par nombre d'histoires à tiroir où le héros s'endort au cours d'un rêve, et fait un autre rêve où il revient à la réalité de départ, sans plus trop savoir où il en est. Tout ceci a pour but d'assouplir notre croyance dogmatique et quasiment jamais remise en question en la réalité de l'apparence du monde extérieur. Pour le Yoga-Vasishtha, l'étre libéré (jivan-mukta) est celui qui peut agir tout en gardant un état de sérénité et d'unité intérieure comme, s'il était en état de sommeil profond.
Comme dans le zen, le Yoga-Vasishtha insiste sur la nécessité d 'aller au-delà du corps et du mental. Le méditant avancé qui y réussit peut alors avoir une expérience trés positive de ces deux niveaux, qui deviennent des serviteurs obéissants pour celui qui sait comment les prendre. Nous citons ci-dessous un beau passage sur le sage considéré comme roi de son propre corps.
Voir le monde comme un rêve a été source de sagesse et d'inspiration non seulement pour l'Orient, mais aussi pour l'Occident, bien que de façon moins systématisée philosophiquement et mystiquement parlant. Nous pouvons citer par exemple ces réflexions de Clotaldo extraites de 'La vie est un rêve' de Pedro Calderon de la Barca (1600-1681), le célèbre dramaturge madrilène : "Et qu'arriverait-il si notre vie à l'état de veille, comme notre sommeil, n'était qu'un rêve dans cette vie éternelle à laquelle nous ne nous éveillerons qu'au moment de nous endormir dans la mort?"...."Et toute cette scène de théâtre de note vie sur terre, où nous semblons être des acteurs si occuppés, et les rôles que nous jouons ne sont pas plus substantiels que l'ombre d'une ombre, et le fait de rêver n'est qu'un rêve dans le rêve!"(Acte III)
Les extraits ci-dessous ont été traduits de l'édition anglaise de Swami Venkatesananda (Divine Life Society, Rishikesh). C'est une version semi-abrégée, en 750 pages, du texte sanakrit oiginal.
Quand l'esprit est en paix et que le coeur va d'un bond jusqu'à la vérité suprême, quand toutes les vagues de pensées génantes qui agitent la substance mentale se sont apaisées, qu'il y a un flot de paix ininterrompu et que le coeur est empli de la félicité de l'Absolu, quand on a vu de cette façon la vérité dans le coeur, ce monde même devient une demeure de félicité.(II,12)
Celui qui n'est pas affecté par les autres tout en vivant au milieu d'eux, qui n'a ni excitation ni haine comme quelqu'un pendant le sommeil, celui-là a atteint le Contrôle de soi.(II,13)
Même les paroles d'un jeune garçon doivent être acceptées si ce sont des paroles de sagesse; si elles n'en sont pas, rejette-les comme de la paille, fussent-elle prononcées par Brahman le créateur lui-même.(II,18)
Ce n'est pas faire preuve de sagesse que de déclarer la vérité ('Brahman seul est réel') à l'ignorant. En effet, la réalité de l'apparence du monde qui a pris profondément racine dans le coeur de l'ignorant, ne sera pas dissipée si ce n'est par un questionnement profond à propos du sens des Ecritures.(IV, 31)
Ne sois pas mené par les autres; seul les animaux sont menés par les autres. Réveille-toi du sommeil de l'ignorance. Réveille-toi et bats-toi pour mettre fin à la vieillesse et à la mort.(IV,32)
La non-reconnaissance de l'existence de la paix suprême dans le coeur et la croyance a priori en la réalité de facteurs en faits imaginaires, tout cela est né d'une connaissance imparfaite et de la logique pervertie qui en résulte. (II, 20)
Pour l'ignorant, ce corps est source de souffrance; mais pour celui qui est éveillé, ce corps est la source d'une joie intense et infinie. Tant que le corps existe, le sage en retire un grand plaisir et la joie de l'éveil, et quand le compte de ses jours touche à sa fin, il ne considère pas du tout cela comme une perte. Puisque c'est par le corps que le sage fait l'expérience des différents sens et gagne l'affection et l'amitié des autres, c'est pour lui une source de bénéfice. Tant qu'il demeure dans cett cité appelée corps, l'être éveillé règne avec bonheur, à la manière d'Indra le roi des cieux dans sa capitale...Celui qui habite un corps entre légèrement en contact avec celui- ci tant qu'il dure, mais n'est plus touché par lui quand il s'en va, de même que l'air touche un vase qui existe, et non pas un qui n'existe pas... De même que si vous savez que quelqu'un est un voleur et que vous êtes en rapport avec lui en tenant compte de cette information, il peut devenir votre ami, de même quand vous profitez des objets extérieurs en connaissant leur vraie nature, ils vous procurent de la joie. Le sage qui a dépassé tous les doutes et dans lequel il n'y a pas d' image de soi règne suprême dans le corps.(IV,23)
Pour le sage, le mental est un serviteur obéissant, un bon conseiller, un maître des sens compétent, une femme agréable, un père protecteur et un ami fidèle. Il le pousse à faire de bonnes actions.(IV, 24)
Tel l'effort, tel son résultat, ô Rama; c 'est ce que signifie l'effort qu 'on fait
Par soi-même sur soi-même et on l'appelle aussi destinée ( 'daiva'; qui peut également signifier 'dieu' ). Quand ils sont en proie à la souffrance, les gens se mettent à pleurer 'Malheur ! quelle tragédie!' 'Hélas, voyez quel est ma destinée!', les deux signifiant la même chose. Ce qui est appelé destinée ou volonté divine n'est rien d'autre que l'action ou l'effort du passé. Le présent est infiniment plus puissant que le passé. Il sont en fait stupides, ceux qui sont satisaits avec les fruits de leurs efforts passés (qu'ils considèrent comme la volonté divine) et ne s'engagent pas dans un effort sur eux-même dans le présent...Le sage doit bien sûr savoir ce qu'on peut obtenir par l'effort, et ce qu'on ne peut pas...Rama, ce sage Vishvamitra est devenu un Brahmarishi par l'effort; nous tous (les autres rishis, les sages à l'origine de l'hindouisme) avons atteint la connaissance de nous-même par l'effort seulement. C'est pourquoi, renonce au fatalisme et fais effort. L'effort spirituel est rendu en sanscrit par 'purusharta' qui signifie aussi ' le but de l'homme ', et éventuellement 'la richesse de l'homme' .(II, 6, 8)
Celui qui voit que le plaisir et la douleur se chassent et s'annulent l'un l'autre retire de cette sagesse le contrôle de lui-même et la paix. Celui qui ne voit pas cela dort dans une maison en flammes.(II,13)
L'Un ne devient jamais multiple, ô Rama. Quand de nombreuses bougies sont allumées successivement l'une à partir de l'autre, c'est la même flamme qui brûle en chacune d'elle; de même, le Brahman unique semble être multiple. Quand on contemple l'irréalité de cette diversité, on est libéré de la souffrance.(lII, 66)
(Vasishtha raconte l'histoire d'une femme démon, Karkati, qui après un certain temps se retire dans l'Himalaya, tourne complètement son attention vers l'intérieur et obtient la Réalisation. Il en fait l'éloge en ces termes) : 'Elle a atteint la connaissance directe de la cause suprême de toute chose, de la cause sans cause par son propre examen de l'intelligence au-dedans d'elle même. ô Rama, il est certain qu'une recherche directe dans les mouvements de pensée de sa propre conscience ne représente nul autre que le guru ou le précepteur suprême.(III, 75)
(Comme il faut quand même qu'elle se nourrisse, Karkati obtient des dieux l'autorisation de dévorer ceux qui sont réfractaires à l'enseignement de sagesse... Elle rencontre dans une forêt profonde un roi et son ministre et pose au monarque des sortes de questions de Sphinx à propos du Soi) : '0 roi, qu'est-ce qui est un et pourtant multiple, et dans lequel des millions d'univers se fondent comme les vagues dans un océan? Qu'est-ce qui est pur espace, bien qu'il ne semble pas être ainsi? Qu'est-ce qui est moi en toi et toi en moi; qu'est-ce qui bouge et pourtant ne bouge pas, qui demeure immobile bien qu'en fait il n'en soit pas ainsi; qu'estce qui est un rocher, bien que conscient, et qui joue des tours merveilleux dans l'espace vide; qu'est-ce qui n'est ni le soleil, ni la lune ni le feu et pourtant brille éternellement; qu'est-ce qui n'est autre que le soi à l'intérieur de chacun, mais qui pourtant n'est retrouvé qu'après de nombreuses existences d'efforts persistants et intenses ?
Qu'est-ce qui se manifeste et s'évanouit en alternance, de même que l'arbre vient de la graine et que la graine vient de l'arbre successivement.' O roi, quel est le créateur de cet univers, par le pouvoir duquel tu fonctionnes comme roi, protégeant tes sujets et punissant les méchants? qu'est-ce qui, par le simple fait d'être vu, purifie votre vision et vous fait exister comme 'cela' seulement, sans division? O roi, pour échapper à une mort certaine, réponds à ces questionne (III, 79). Le roi répond qu'il s'agit du Soi, et il est sauvé avec son ministre.
Vashista dit: Quand deux êtres éveillés se rencontrent, leurs coeurs fusionnent dans la paix et la félicité, de même que les eaux de deux torrents se melent à leur confluent.(III, 78)
Dans l'espace de la conscience, qui est aussi minuscule qu'un atome, toutes les expériences existent, de même que dans une goutte de miel il y a l'essence subtile des fleurs, des feuilles et des fruits. De cette conscience se développent toutes les expériences, car le fait d'expérimenter est le seul expérimentateur (les deux n'étant pas différents de la conscience).(III, 81)
Le sage ne désire pas agir; et il ne désire pas non plus abandonner l'action. (III , 88)
La maladie physique ou psychique, pas plus que les malédictions ou le 'mauvais oeil', ne peuvent toucher le mental de celui qui se consacre au Soi; de même, une fleur de lotus ne peut casser en deux un rocher en tombant dessus. C'est pourquoi on doit s'efforcer avec le mental même d'amener le mental à prendre la route qui est pure.(III, 92)
Quand la conscience abandonne la recherche consistante de soi (et du Soi) et se laisse aller à jouer avec les innombrables pensées qui vont et viennent, on l'appelle conscience individuelle.(III, 96)
Quand on l'observe en profondeur, le mental s'absorbe dans son substrat, et quand il s'absorbe de cette façon, il y a la félicité suprême. (III, 97)
(Voici maintenant un conte typique du Yoga-Vasishtha, nous donnant le goût de dépasser le labyrinthe de nos formations mentales) :
"Un jeune garçon demanda à sa grandmère de lui raconter une histoire, ce qu'elle fit tandis qu'il écoutait avec grande attention :
"Il était une fois une cité qui en fait n'existait pas; y demeuraient trois princes qui étaient joyeux et pleins de valeur. Des trois, deux n'étaient pas nés et le troisième n'était pas conçu. Le malheur voulut que toute leur famille meure. Les princes quittèrent leur ville de naissance pour aller ailleurs. Incapable de supporter la chaleur du soleil, ils s'évanouirent au bout de peu de temps. Leurs pieds étaient brûlés par la chaleur intense du sable, les pointes des herbes desséchées les perçaient. Ils parvinrent à l'ombre de trois arbres, parmi lesquels deux n'existaient pas et le troisième n'était pas même planté. Après s'être reposés là pendant quelques temps et avoir mangé les fruits de ces arbres, ils reprirent la route.
Ils atteignirent les berges de trois rivières; des trois, deux étaient sèches et dans le troisième il n'y avait pas d'eau. Les princes y prirent un bain rafraîchissant et y apaisèrent leur soif. Ils arrivèrent ensuite dans une grande cité qui était sur le point d'être construite. En y entrant, ils y trouvèrent trois palais d'une beauté sans égale. Des trois, deux n'avaient pas étés du tout construits, tandis que le troisième n'avait pas de murs. Ils pénétrèrent dans le palais et trouvèrent trois plats en or; deux d'entre eux avaient été brisés, et le troisième franchement réduit en poussière. Ils saisirent celui qui avait été pulvérisé. Ils prirent 99 moins 100 grammes de riz et le mirent à cuire. Il invitèrent alors trois hommes de Dieu pour être leurs hôtes; des trois, deux n'avaient pas de corps et le troisième n'avait pas de bouche. Une fois qu'ils se furent restaurés, les trois princes mangèrent les restes ('prasad', considéré comme nouriture sacrée). Ils en retirèrent un grand plaisir. C'est ainsi qu'ils vécurent en cette cité pour bien longtemps, dans la paix et la joie." Mon enfant, voici une légende extrêmement belle; je t'en prie, souviens-t-en toujours et tu deviendras un homme de savoir.'(III, 101)
Le mental prend la forme même de ce qu'on contemple, que ce soit un élément de la nature ou de la culture. C'est pourquoi contemple résolument, mais intelligemment aussi l'état au-delà de la souffrance, libre de tous les doutes. Le mental est capable de se maîtriser lui-même; de fait, il n'y a pas d'autre voie.(III, 112)
O Rama, abandonne le conditionnement mental qui est seul responsable pour la perception de la dualité, et demeure totalement non-conditionné. Tu parviendras alors à un niveau de prééminence vis-à-vis de tous. (III, 114)
Toute relation est réalisation de l'unité qui existe déjà; on ne la regarde comme relation qu'à cause de la croyance fausse et illusoire d'une division entre sujets et objet. En fait, il n'y a qu'un Tout, la Conscience infinie.(III, 121)
Le jeune méditant dans la forêt paraissait avoir atteint un état de quiétude totale du mental, où le jeu des pensées et contre-pensées avait cessé. Il était absolument pur, comme un cristal qui n'est pas même intéressé à refléter ce qui est autour de lui.(IV, 14)
Aussi longtemps qu'on voit ce qui est vu avec le sentiment intérieur qu'il s'agit d'objets de perception (différent de soi-même), la réalisation de Brahman est de fait bien éloignée.(IV, 18)
C'est quand on expérimente la vérité qu'on est libéré de l'illusion. Du même coup, son désir forcené pour les plaisirs s'atténue. C'est la seule preuve de sagesse. Un pot de nectar en peinture n'est pas du nectar, ni une flamme en peinture une flamme, et la peinture d'une femme n'est pas une femme : les paroles de sagesse ne sont que des mots, pas de la sagesse tant qu'elles ne sont pas concrétisées par l'absence de désir et de colère.(IV, 18)
Celui qui est empli du lait de la douceur humaine est sûrement la demeure du Seigneur Hari (Vishnou, qu'on dit reposer allongé sur l'océan de lait). (IV, 32)
Quand le mental a été purifié par des pensées et des actions pures, il adopte la nature de l'infini, de même qu'un vêtement pur prend la couleur
facilement. . . Quand le mental abandonne la relation de sujet à objet qu 'il a avec le monde, il est absorbéinstantanément dans l'infini.(IV, 35)
NOUVELLES
- Mort de Maroni au mois d'août : Maroni était la petite fille de la soeur de Didima (la mère de Ma). Le mari de Ma, Bholonath, s'était pris d'affection pour elle et l'avait adopter. Elle avait donc été éduquée de très près par Ma, elle dormait quand elle était petite avec Ma et Bholanath. Elle était souvent à Kankhal. Au dernier anniversaire de Ma, elle avait chanté des bhajans, ce qu'elle faisait toujours avec une grande énergie. Elle avait plus de 70 ans, avait été mariée mais vivait depuis logtemps dans les ashrams de Ma. Quelques jours avant son décés subit et inattendu, elle était venue saluer Vijayananda comme elle le faisait souvent le soir en face du samadhi, mais cette fois-ci elle lui avait dit : 'ViJayanananda, je vous aime beaucoup'. A la fin de sa vie, elle avait pris comme nom 'Niropa Ma' 'mère sans forme', comme si elle se préparait à quitter sa forme corporelle.
- Le Centre international a commencé à être fonctionnel début août, avec comme premiers hôtes Chantale et Jean-Luc de Plougastel en Bretagne, lecteurs de Jay Ma et suivant la voie spirituelle du Yoga. Une bibliothèque a été constituée, et Shantimayi (Karine Huvelle) va s'installer au Centre à long terme à partir de début Octobre. Elle a eu un visa de touriste de cinq ans pour l'Inde tout récemment, ce qui est une sorte de miracle car cette forme de visa ne se donne plus.
- Nous avons reçu la visite de deux groupes français, l'un avec Daniel Maurin et l'autre avec Jean-Yves Leloup.
- La samyam saptah aura lieu du 6 au 13 novembre. Mieux vaut réserver pour ceux qui voudraient résider à cette époque au Centre International; le Centre n 'a pas encore la liaison téléphonique, mais en cas de besoin on peut téléphoner à l'ashram :19 91 133 42 65 75
- La pleine Kumbha-Mela d'Hardwar, où l'on attend une dizaine de millions de personnes, commencera progressivement à partir de mi-janvier pour battre son plein à partir de Shiva-Ratri (fin février environ) et atteindre son maximum pour Mesh Sankranti, le 13 avril. Les trustees du Centre inters ational ne sont toujours pas décidés pour savoir s'ils doivent prendre des réservations pour cette période.
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