Extrait
chapitre
numéro
42

JayMâ-n°94

Cette brochure représente un lien d'amour avec l'Inde, avec Mâ, avec les Swamis, les lectures, les voyages...

Jay Mâ n°94

(AUTOMNE 2009)

Ma Anandamayi

Paroles de Mâ

Tout ce que notre esprit accepte, hormis Dieu, est synonyme de souffrance.     

Le bonheur et le malheur sont dans l’agrément ou le non-agrément de quelque chose. Si vous désirez aller au-delà de cet agrément et de ce non-agrément, acceptez-Le. Si vous désirez aller outre, alors invoquez-Le.

Qui est souffrant ? Qu’est-ce qui est souffrant ? Qui cause la souffrance à qui ? Où est la souffrance ? C’est le Soi avec le Soi. Si les dents d’une personne mordent sa propre langue, qui ressent la douleur ? Ce sont les propres organes de cette personne qui la ressentent, son corps – le Soi en Soi.

Nous assumons notre corps pour connaître l’expérience des plaisirs et des douleurs de ce monde. Pour aller au-delà de ce bonheur et de cette souffrance, il faut aller chercher refuge en Lui.

Il est Celui qui élimine toutes les souffrances. Faites appel à Lui, tout le temps. Gardez-Le dans vos méditations, priez-Le. Offrez-Lui votre obéissance et ouvrez-Lui totalement votre coeur. Tout en Lui est bénédiction, paix et béatitude. Il est Le Coeur des coeurs. Il est l’Atma (l’Âme Suprême).

Quoi que Dieu fasse, Il le fait pour le bien. De même que le médecin pratique une incision dans le furoncle et en extrait la substance purulente pour soigner le mal, Dieu, Lui, vous donne la souffrance, vous lave et vous sèche puis vous prend dans Son étreinte. Dieu corrige toutes les fautes et dit : « Donne-moi toutes tes impuretés et reçois l’immortalité en retour ». Il envoie la souffrance et la détresse à Ses adorateurs pour faire grandir leur ardeur et accroître leur aspiration. Dieu accepte leur dévotion lorsqu’elle passe par les larmes et la souffrance.

La souffrance ne disparaît que lorsque Dieu est réalisé. Il n’y a aucune autre façon de Le réaliser qu’en pratiquant le japa de Son nom, en méditant sur Son nom, en le vénérant et chantant Sa gloire (Naam Kirtan). La compagnie de personnes élevées spirituellement (satsang), la lecture de livres spirituels sont une aide sur cette voie. Très souvent ce corps dit une chose : « vishay (la vie par les sens) mane (signifie) vish (poison) hoi (devient) ». Le plaisir que procurent les sens conduit lentement vers la mort – « poison lent ». C’est pour cela que vous devez passer autant de temps que possible avec Lui.

Pour trouver une protection contre ces trois sources d’oppression (afflictions) il faut avoir recours à l’aide d’un autre type d‘oppression (taap). C’est par l’oppression qu’on peut combattre l’oppression. C’est ce qu’on appelle tapasya (‘austérité’, littéralement, ‘ chaleur’ ; ‘ dessèchement’). C’est avec tapasya qu’on peut vaincre l’oppression. Tout comme on ressent la souffrance en affrontant l’oppression de ce monde, on peut connaître la même souffrance au début, lorsqu’on prend le nom de Dieu. Mais ce n’est qu’en passant par cette souffrance qu’on se libère de l’oppression. C’est pour cela que l’effort est indispensable, la pratique est indispensable et l’action est indispensable. Les oiseaux par exemple, ou les animaux en général, n’ont aucun intérêt à se débarrasser de la souffrance de cette façon, pour la réalisation de Dieu à tout jamais plein de grâce et de félicité. Cela n’est valable que pour les êtres humains.

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Dialogues avec Mâ

Extraits du livre de Jean-Claude Marol :
La Saturée de joie (éditions Dervy)

Garder le silence ou pas?

Et le jeu commença!

Elle dit, mutine :

S’il y avait la moindre conscience de moi, je pourrais dire je suis.

Comme ce n’est pas le cas, vous pouvez dire ce que vous voulez!

Cela laisse le champ ouvert! Tentons l’aventure de dire un peu!

Celle qui en Inde fut nommée Mâ Anandamayî, et qui ces dernières décennies, traça tant de sillages dans tant de coeurs, dit aussi, simplement:

Soyez plein de vie partout ou vous allez, et rien ni personne ne vous sera étranger.

Nous n’évoquerons pas dans ces pages une étrangère! Je forme le voeu que ce livre nous aide a rencontrer un ‘être plein de vie’, infiniment proche. Pour nous avancer vers ce Très Proche, le geste à faire est un moindre geste!

Les approches par lesquelles les humains tentent de réaliser le Soi sont d’une infinie variété; et chaque variété comporte d’innombrables aspects. Tous ces modes de recherche m’apparurent comme des parties de moi-même.

L’oiseau en vol

Q.: Vos réponses sont tellement en accord avec nos Ecritures que vous n’avez pas étudiées…comment est-ce possible?

Ma répondit :

Il y a le grand livre de la vie. Si on s’y plonge profondément, toutes les vérités expliquées par les écritures, sont la, prêtes à se révéler!

Elle se disait parfois udha pakhi (oiseau en vol) qui se perche ici ou là de façon imprévisible. Elle dira un jour, alors qu’on venait de lui faire la remarque:

-Mâ, parfois vous semblez porter une grande attention a quelqu’un; d’autres fois, vous ne nous accordez pas même un regard.

-je ne me comporte d’aucune façon particulière vis-à-vis de qui que ce soit. Il ne s’agit absolument pas de comportement.

-Alors à qui parlez-vous?

-Ce corps, c’est ainsi, ne parle à personne, ne va chez personne, ne mange la nourriture de personne …. Pour ce corps il n’y a qu’Un. Il n’y a pas même la possibilité d’un second. Je ne vais nulle part, je suis toujours ici. Il n’y a ni allées, ni venues. Tout est Dieu.

En notre temps, déchiré par tant de fanatismes, où nous sommes arc-boutés sur tant de “quant-à-soi”, écoutons-la nous dire, et cela paraîtra contradictoire avec les mots qui précèdent – à nous d’étendre ce qui est déguisé par le langage :

Ici, dans ce corps est une relation avec tout un chacun.

Ici, pas d’abris, de demeure séparée.

Si vous voulez parler de demeure, il n’y en a qu’une, et elle est sans limite!

Où est le nom ; où est la forme ?

Il est certes nécessaire de rétablir le balancier d’une spiritualité généralement « patriarcale », en saluant le versant féminin (entre autres sous son jour maternel). Mais ultimement une vraie vision du Père Premier et de la Mère Première, implique que l’on transcende les aspects mâle et femelle ; comprendre un peu Anandamayî demande que l’on soit capable de la vivre sans qu’elle soit ni ceci, ni cela, ou contenant et ceci et cela. Dans l’Atharva Veda (VII-6) la Déesse Première Aditi, est saluée ainsi : « Aditi est Mère, elle est Père, elle est fils. »

Mâ Anandamayî nous invite souvent a perdre nos repères : nos clivages masculin – féminin ou d’autres paires d’opposés. Nous y reviendrons un peu plus loin.

Elle est, certes, notre mère ou notre enfant, elle est surtout Une avec qui que ce soit, quoi que ce soit. Cela, elle le confie souvent, sous une forme ou sous une autre, car nous avons besoin de l’entendre et de le réentendre !

Alors qu’un occidental lui demandait de façon insistante quel message d’elle il pourrait répercuter quand il serait rentré dans son pays, et comment il pourrait évoquer sa présence, elle répondit en souriant :

Très bien. Dites à vos amis : j’ai vu une gamine ; elle papote sur tout ce qui lui arrive. A tout ceux qui voudront en savoir plus, dites-leur que je suis leur enfant. Mais en réalité, vous tous et moi, sommes un, n’est-ce pas ? Il n’y a qu’un souffle qui imprègne tout, il n’y a rien d’autre qu’Un. Vos penchants inconscients (samskara) dressent un mur qui vous enferme.

Le destin humain est d’effondrer cette limite qui vous sépare de votre propre nature. Réaliser sa propre nature, signifie réaliser Dieu, c’est réaliser l’Unique Réalité !

Non-quoi-que-ce-soit

Une direction donnée permet d’atteindre un but donné ; tout le reste par ailleurs, demeure hors d’atteinte. Mais quand la différence s’évanouit entre ce qui s’atteint et ce qui est hors d’atteinte, alors Cela se révèle !

Elle ajoutera :

Le mystère de l’univers révèle à qui sait savourer le non-quoi-que-ce-soit.

Vous voulez jouer ….

Ce corps n’est qu’une poupée. Vous voulez jouer avec elle…elle joue !

Humour encore de Mâ Anandamayî, traitant des propos considérés comme sérieux Un jour, elle s’exclama :

Vous vous émerveillez vis-à-vis de celles et ceux qui renoncent au monde…en réalité, c’est vous qui renoncez à tout ! Quel est ce tout ? Dieu, ni plus ni moins ! Le  laisser de côté est la renonciation suprême ! (Et le transcripteur note : à ce moment elle éclate de rire !)

Une autre fois elle fit la remarque :

Dans le domaine spirituel, vous aimez vous sentir libre de toute obligation ! Vous réservez à tous les autres domaines de votre vie, votre grande capacité à être dépendants …. (autres rires !)

Laissez les mouches s’amuser un peu !

Quand elle arrive au vaste ashram de Bénarès, elle s’inquiète de chacun des humains présents, et va saluer avec la même attention individuelle, vaches et veaux.

Cette tendresse se manifestait pour le moindre insecte. Une fois, un insecte escaladait un coussin où Mâ était assise ; une jeune fille brahmacharini s’en aperçoit et le repousse. L’insecte recommence son escalade. Mâ prend la serviette qui protège sa tête et délicatement y installe l’insecte qui ne bouge pas. Mâ remarque qu’il semble absorbé dans une profonde méditation. Un peu plus tard, Mâ regarde intensément l’insecte et annonce qu’il a quitté son corps. Elle demande qu’on le porte au Gange, enveloppé dans sa serviette. Cet insecte avait une rencontre qui avait bouleversé sa vie !

Texte tapé par Sandrine Oubrier à Kankhal

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Préface

au recueil de paroles de Mâ
« Vangmayee  Ma »

Par Vigyânânand (Dr Jacques Vigne)

    C'est dans l'Himalaya, à l'ermitage de Dhaulchina, situé au nord-est de Delhi dans l'angle de l'Inde entre le Tibet et le Népal, que j'ai pu avoir connaissance du texte anglais non encore publié de Vangmayee Ma (ou Vangmayî Mâ). Il s'agissait de la traduction à partir  du bengali d'un recueil assez fourni de paroles de Mâ classées par thème. J’ai reçu ce texte de  Swami Nirgunânanda, mon voisin dans ce bel ermitage où il vit depuis 22 ans. Il a effectué lui-même une bonne partie des traductions à partir du bengali, et a travaillé avec une autre personne qui elle, était partie de la version en hindi, nécessairement moins précise puisqu'elle était elle-même déjà une traduction de l'original bengali. Swami Bhaskarânanda, qui était le bras droit de Mâ et auquel celle-ci a confié la charge de donner l’initiation après le décès de sa mère Didi Mâ, a beaucoup encouragé la traduction de ce livre du bengali en anglais, pensant qu’il était bon de revenir facilement, grâce à cette anthologie, à ce que Mâ disait directement. Nous avons décidé de publier ces paroles de Mâ à la fois en français et en espagnol pour mettre sur le site de Mâ Anandamayî. C’est Jean E.Louisde Nice qui s'est chargé de la traduction française, que j'ai révisée, en discutant un certain nombre de points peu clairs dans le texte anglais avec Swami Nirgunânanda à l'ermitage. À chaque fois, il est revenu à l'original bengali, nous avons discuté de ce qu’a vraiment voulu dire Mâ, et cela a permis d'améliorer certains points obscurs de la traduction anglaise, et de les rendre plus clairement à la fois en français et en espagnol. Pour cette dernière version, c'est Andrea Veselich qui s'en est chargé. Jeune avocate passionnée par l'Inde, elle ne vit cependant pas tout près, puisqu'elle réside en Patagonie, la pointe sud de l'Argentine près de la Terre de feu... Mais grâce à l'Internet et à sa bonne volonté, car elle ressent un lien fort avec Mâ, elle a pu rendre ce service de traduction au lectorat hispanophone intéressé par la sagesse de l'Inde.

    Swami Vijayânanda qui a passé plus de 30 ans auprès de Mâ Anandamayî, et vit toujours dans ses ashrams après 57 ans continûment en Inde, dit clairement et fortement : guru vakya mantra, ‘la parole du gourou est un mantra’. Dans la Guru Gita, il est aussi une strophe célèbre où il est dit mantra-mulam guru-vakyam, ‘la racine du mantra, c'est la parole du gourou’. La qualité principale du gourou n'est pas de donner un enseignement intellectuel et linéaire, mais d'avoir un impact par une transmission de l'énergie, ce qu'on appelle dans le langage traditionnel le shaktî-pat. Il peut le faire à travers un mantra chuchoté dans l'oreille au moment de l'initiation rituelle, mais aussi à travers n'importe quelle autre parole survenant dans n'importe quelle autre circonstance, à travers le don d'un objet, d'une fleur, d'un prasâd, et encore, sans aucun intermédiaire (anupaya), de façon directe, d’âme à âme. Du trop-plein de ce réservoir d'énergie qu’est le gourou, le manque du disciple peut être comblé.

   Pour bien comprendre comment Mâ transmettait l'énergie, il ne suffit pas de lire ces paroles, mais il faut également se plonger dans sa vie et dans les expériences de ses disciples proches. Nous avons traduit en français sous le titre de Matri Darshan (i) , le témoignage princeps de Bhaiji, le premier grand disciple de Mâ Anandamayî après son mari Bholonath, et qui a donné à celle qui s'appelait auparavant Nirmala Dévî le nom d'Anandamayî. Il y a aussi l'ouvrage de Bithika Mukerjee qui donne beaucoup de détails (ii), et le dernier livre de Jean-Claude Marol – il est paru deux mois avant sa mort trop précoce – La Saturée de joie aux éditions Dervy. Il y développe en particulier l'importance du féminin spirituel, et le lien qu’il discernait entre le lien avec Mâ et le respect pour l’image de la Dame au Moyen Âge, qui a continué dans le catholicisme jusqu'à nos jours à travers le culte de Notre-Dame.

(i) Publié en 1996 par les éditions Terre du Ciel, maintenant épuisé, mais disponible sur le site www.anandamayi.org , section française.
(ii) Disponible sur le même site pour toute la première partie qui parle de la vie de Mâ jusqu'à environ 35 ans.

   Il y a tout un mouvement de fond au XXe siècle et qui prend de l'ampleur maintenant : il tend à remettre à l'honneur l'aspect féminin du sacré. Il peut se manifester à travers l'écologie, où Gaïa est présentée comme une personne vivante, la déesse Terre, qu'il faut respecter et cesser de violer dans tous les sens. Par ailleurs, à cause du conflit israélo-arabe chronique au Moyen-Orient, beaucoup de gens sensés se mettent à réaliser que le monothéisme avec son dieu purement mâle et exclusivement unique, risque de ne jamais réussir à dépasser les guerres saintes, et qu'au contraire les armes de destruction massive exposent au danger qu'elles deviennent beaucoup plus dévastatrices qu'auparavant, ce qui n'est pas peu dire. D'où la nécessité de renforcer l'aspect féminin du sacré, en encourageant le développement d’enseignantes religieuses femmes et aussi du point de vue métaphysique, en remettant à l’honneur le couple divin dieu/déesse qu’on retrouve dans pratiquement toutes les formes religieuses de l'humanité, excepté le monothéisme.  

      De plus, l'aspect féminin de la mystique est aussi relié à l'expérience chamanique, restant proche de la source et peu encombrée de dogmatiques et d’idéologies religieuses. Dans ses débuts, l’auto-initiation de Mâ par exemple et ses transes multiples évoquaient tout à fait la descente d'une expérience chamanique. Cependant, Mâ n'est certainement pas restée à ce niveau, elle était déjà prise dans le vaste courant de la bhakti du Bengale avec les grands exemples de Chaitanya Mahâprabhu au XVIe siècle et de Râmakrishna au XIXe. Elle a passé sa vie de gourou à guider la majorité de ses disciples sur cette voie traditionnelle de la bhakti, d'où ses multiples conseils dans cet ouvrage sur la récitation du mantra et la force du lien avec le gourou, mais elle était aussi solidement enracinée dans la voie de la connaissance et dans l'expérience de l'Un. Elle revient tout le temps à l’Unité fondamentale, en exprimant en des termes simples, mais forts, l'absence de dualité et la capacité fondamentale qu'a un être humain à se relier directement à l'Absolu sans intermédiaire.

   Un mot d'explication sur le sens du titre de ce livre, Vangmayî Mâ. Il signifie’ la Mère pénétrée, constituée de Parole’. Ce nom évoque la première forme de la Mère divine dans les védas, Vak, de la même racine que vox en latin et ‘voix’ en français, cette déesse « Voix » donc qui permet l'expression audible du Brahman. On dit qu'elle est née de la langue de ce Brahman, ou parfois qu'elle en est son épouse. Elle n'est pas sans évoquer la Hohkhma-Sophia-Sagesse de la mystique juive. Dans l'hindouisme classique, elle s'est transformée en Sarasvatî, déesse blanche de la pureté, de l'enseignement et de la connaissance, ainsi que de la musique. Elle réside (vatî) sur un cours d'eau (saras), c'est le sens de son nom. Cet archétype s'associe assez spontanément à Mâ Anandamayî, qui a été toute sa vie vêtue de blanc, et dont l'ashram principal et le tombeau sont situés au bord du Gange tout près d'Hardwar. Ce qu'il y a de particulier dans le cas de Mâ, c'est qu'il ne s'agissait pas d'une divinité vieille de plusieurs millénaires et présente uniquement sur le plan subtil, mais d’une personne bien vivante qu'on pouvait rencontrer si on le voulait. Dans ce contexte, la transmission d'énergie était beaucoup plus puissante et concrète, au moins pour les visiteurs ou disciples qui avaient l'ouverture requise pour recevoir ce transfert.

    Au début de cet ouvrage,  nous avons traduit telle quelle la préface à l'édition hindi. Elle est écrite dans le style fleuri de l'Orient et de la bhakti. C'est certes un autre monde mental que celui de l'Occident rationnel contemporain, mais pourquoi ne pas entendre ce qu'il a à nous dire de temps en temps ? Surtout quand il y a contact direct, le coeur est touché et peut transcender bien des barrières culturelles. Sarvâtma était un des premiers disciples français de Mâ Amritânândamayî. Il avait très peur en France que sa manière d'embrasser les gens pendant le darshan et de leur distribuer des bonbons choque avec un public plutôt rationaliste et quelque peu coincé. En fait, rapidement, il y a eu de longues queues pour passer dans les bras de celle qu'on appelle Amma, et donc celle-ci s’est mise à se moquer de Sarvâtma en lui disant : « Regarde donc tes Français ! Ils sont prêts à attendre des heures simplement pour avoir un bonbon ! »

       Quand on lit continûment le livre, on s'aperçoit que Mâ revient souvent sur des thèmes fondamentaux car elle voulait donner des bases au public général de visiteurs qui venaient la trouver. Le classement par thèmes est intéressant quand on veut méditer directement sur un sujet précis, mais il a l'inconvénient de faire ressortir certaines répétitions. Cependant, celles-ci peuvent avoir un effet ‘mantrique’ sur le lecteur : avec une mouvement qu'on pourrait appeler en spirale, on revient régulièrement au même point, mais à un niveau de profondeur plus grands. Mâ conseille d’ailleurs le mantra comme une méthode accessible à tous, capable d'accompagner le processus de transformation et de purification du sâdhaka à long terme. Une bonne partie des conseils de son livre pourrait se résumer ainsi : « Répétez votre mantra avec persévérance et une confiance complète dans le gourou, et vous atteindrez un niveau où toutes les questions et les contradictions seront résolues spontanément. » Cependant, il ne faut pas rester sur une fausse impression de simplisme en lisant ce livre d'une traite. Dans les entretiens privés, Mâ donnait bien d'autres enseignements et exercices de méditation que le mantra. Quand j'ai demandé à Swami Vijayânanda qui, nous l'avons dit, a passé plus de 30 ans sous la guidance directe de Mâ, s'il récitait le mantra quand il s'asseyait pour la méditation, il m'a répondu que non. Par contre, quand il fait sa cuisine ou des activités concrètes, il aime bien garder l'esprit relié à l’Absolu et à Mâ grâce au japa, mais quand il était assis en méditation, il aimait bien suivre ses propres pratiques et leur évolution spontanée. Pendant toute la période de début, il était dans l'idée qu'un gourou doit avant tout donner des conseils de techniques de méditations, des kriyas, et Mâ effectivement lui en a donné abondamment lors d'entretiens privés. Cependant, à chaque fois qu'elle en expliquait quelques-uns, elle ajoutait ; «  Ceci est un exercice secret, ne le répète pas. »   Mâ a expliqué aussi que les kriyas étaient faits pour secouer la torpeur, le tamas. La plupart des gens sont somnolents, mais c'est bon pour eux de faire quelque chose, que ce soit des kriyas ou des rituels. Cela leur donne un  début de réveil. Cependant, à un niveau élevé, la volonté de faire quelque chose se révélera être un obstacle. Mais ce « non faire » n'est pas pour les débutants. Un autre aspect des kriyas, ou rituels, doit aussi bien être compris : ils peuvent être destinés à éveiller des pouvoirs, comme les techniques de toumo chez les tibétains qui développent la capacité de ressortir le feu intérieur et donc de résister aux grands froids. Pour aller plus loin, on peut évoquer aussi les pratiques de magie qui sont des formes de kriyas, mais qui peuvent tourner à la magie noire. Au fond, quand la vie intérieure est éveillée, la manière de méditer vient spontanément. On ne peut pas en faire une généralité. Ce qui vous réussit à vous peut être inutile, voire dangereux pour d'autres. Il en va de même pour les conseils que le gourou vous donne personnellement, d'où l'avertissement de Mâ.

    Dans ce sens, on dit dans la kabbale qu'il y a trois niveaux d'enseignements, le niveau général correspondant aux conseils que le maître donne à un petit groupe, le niveau personnel dans sa relation à un disciple en face-à-face, et le niveau supérieur sous forme d'expériences qui remontent spontanément chez le disciple, mais qui n'en sont pas pour autant étrangères à la présence du maître. Vijayânanda ajoute que les kriyas ne sont pas si importants, la voie spirituelle dans son ensemble est beaucoup plus large qu’une sorte de technologie où la révélation d'un code secret pourrait vous ouvrir l'accès à tous les programmes d’un coup. Cette voie spirituelle nécessite un engagement complet de l'individu : il est bon déjà d'avoir une base large de lectures et de connaissances pour comprendre vraiment quel est son intérêt, et ensuite de s'impliquer dans une pratique destinée d'emblée à transformer toute la vie et le comportement concret. Cela est beaucoup plus large que l'exécution plus ou moins mécanique de certaines techniques méditatives supposées secrètes et toutes-puissantes.

   Il est tout à fait classique en Inde d'insister sur l'abandon entre les mains du gourou. Ceci choque les occidentaux qui ont d'ailleurs souvent perdu le lien avec la spiritualité traditionnelle chrétienne qui insiste elle aussi à sa manière sur l'importance du maître spirituel et du voeu d'obéissance pour les moines. « Être comme un cadavre dans les mains du laveur de mort » disait par exemple Ignace de Loyola. J'ai essayé d'éclaircir ces questions dans mon premier ouvrage, Le maître et le thérapeute, qui parle de la relation d'aide à la fois spirituelle et psychologique. De son côté, SwamiVijayânanda a tendance à distinguer deux niveaux, le niveau concret où il obéissait à la lettre aux paroles de Mâ, justement pour le plaisir en quelque sorte de montrer qu'il était capable de faire ce qu'elle lui demandait, et un niveau plus profond où il gardait tout son discernement et sa liberté.   Mâ ne semble pas avoir été choquée par son attitude, constatant sans doute qu'elle relevait plus de la voie de la connaissance que de celle de la dévotion. Dès leur premier entretien à Bénarès en février 1951, elle avait d’ailleurs constaté et dit de lui qu'il était un pranava upasaka, littéralement  un ‘adorateur du Om’, c'est-à-dire quelqu'un qui suivait la voie de la connaissance. Dans ce sens, elle ne lui a jamais demandé par exemple de faire de poujâ ni de centrer sa dévotion sur la forme d'une divinité hindoue.

    Mâ disait d'elle-même qu'elle n'était pas une réformatrice, qu'elle avait pris l'hindouisme comme il était, et qu'elle ne faisait que transmette l'enseignement de l'Inde ancienne et des rishis-munis de jadis. Elle a accompli cette tâche avec un souci de la perfection et en transmettant tout autour d'elle une énergie indubitable d'amour et de joie.

Vigyânânand
Kankhal, Hardwar, Inde, mars 2009

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Introduction

à la version hindi de ‘Vangmayî Mâ’

Les mots prononcés par les lèvres vénérées de Sri Mâ – Mâ qui habite le coeur de tous, Mâ qui est pure et éternelle – ces mots de Sri Mâ sont une  manifestation particulière de la Mère divine en tant qu’Essence de la parole. Tout au long de Sa Lîlâ (son jeu) en ce monde, Mâ s’est communiquée dans la pureté de Ses paroles. Avant que ne s’achève Sa Lîlâ ici-bas, Mâ a donné une idée de ce qu’est l’appel du non-manifesté. Dans le présent, Mâ brille de son éclat dans les mots de la Katha Upanishad :

On se libère des serres de la mort lorsqu’on connaît Cela qu’on ne peut entendre ni toucher, qui est incolore et inaltéré, qui est sans goût, éternel, inodore,  sans commencement ni fin, qui est distinct de Mahat [l'espace primordial] et toujours constant.

Mâ a dit : « Je viens à votre portée, mais je ne vous permets pas de m’accaparer ». Les paroles reviennent et l’esprit ne peut s’en emparer, comme on dit dans une Upanishad :

yatho vacha nirvartante aprapya manasa saha

Durant l’accomplissement de Sa Lîlâ, dans cette sphère qui est à notre mesure – Mâ s’est présentée Elle-même – dans la forme humaine de la mère – la Lîlâ de Sri Mâ Anandamayî. Elle était l’âme de Ses disciples et la grâce personnifiée. Elle était d’une douceur sans pareille et cette douceur masquait Sa divine grandeur. Sa céleste magnificence allait au-delà de toute imagination. Sa Lîlâ était le Râs, l'essence, la sève de l'expérience personnifiée. Quelques rares personnes ont le bonheur d’être en mesure de visualiser, aujourd’hui encore, [dans leur mémoire] l’irréprochable Lîlâ de Mâ – la Lîlâ dont il faut faire l’expérience pour la conserver gravée dans la conscience. Mais alors quel est l’état d’être, la condition, de ces innombrables âmes ordinaires qui ne jouissent pas de cet incomparable privilège, qui n’ont jamais rencontré Mâ ? En effet, les premiers, tous ceux qui ont vécu à l’ombre apaisante de l’amour et de l’affection de Mâ – la mère tendre et douce dans la forme humaine, ceux qui ont grandi sous Sa protection, sous Sa discipline aimante et chaude, tous ceux-là, ressentaient que la présence toute proche de Mâ,  était la plus grande consolation durant les temps de détresse et de souffrance qu’ils connaissaient. La chance inestimable de ces êtres, de ces disciples de Mâ, aurait-elle pris fin ? Non ! Le privilège extraordinaire d’avoir vécu aux côtés de Mâ s’est peut-être évanoui, quelque part dans les méandres du passé, mais les paroles de Mâ, elles, sont là, dans la forme écrite. Elles sont là, dans le présent. Et elles seront là aussi dans le futur.

Une force rayonnante et l’image ineffaçable de Son geste offrant des guirlandes de mantra, ce sont là d’inoubliables et merveilleux souvenirs de Mâ. Les paroles de Mâ sont la source d’un intarissable nectar. La publication de ce livre, bénie par la caresse transcendante de ce ruissellement, est le fruit d’un effort dont on souhaite qu’il mène à un bain purificateur. Mâ n’a écrit aucun livre. Les mots qu’Elle prononçait venaient d’Elle, mais ne Lui appartenaient pas. Le nectar de Ses paroles jaillissait spontanément. Il contenait la réponse aux questions de Ses innombrables disciples qui souffraient des trois tourments [qui viennent de soi, des phénomènes naturels et des dieux, une classification habituelle dans l'hindouisme] que nous, les êtres humains, sommes condamnés à endurer en ce monde. Nous avons réuni, dans cet ouvrage, un certain nombre des paroles de Mâ.

Mâ Anandamayî manifeste la Mère divine qui est l’âme du bîja-mantra (mantra-semence), qui a porté à la lumière les Vêda (Ecritures sacrées), qui est omniprésente, qui est dans la forme du Pranava [le Om]. Les paroles d’une telle Mère expriment l'essence des Védas. Les mots de Mâimprègnent l’univers tout entier. Elle règne dans l’océan de l’esprit agité de Ses disciples, sous forme de  vérité et de paix éternelle.

Qui donc sont les sources concrètes de ce témoignage – ce livre, en l’occurrence – qui est la manifestation du svarûpa, de l'essence de Mâ ? Ce n’est ni la pierre, ni le métal, ni le bois. Ce n’est ni la boue, ni la pluie. Les mots, ce ne sont que les mots. Filtres de nectar engendrés par les paroles physiques de Mâ. Les source essentielles du présent ouvrage sont « Ânanda Varta » (journal trimestriel du mouvement de Mâ publié depuis 1952  et qui a recueilli jusqu'à ce qu'elle quitte son corps en 1982 ses faits, gestes et dires lors de ses nombreuses déplacements et interventions publiques), Matri-Darshan de Bhaiji, ainsi que les enregistrements de quelques conversations, dans lesquels on peut entendre les paroles de Mâ,  que l’on peut retrouver également couchées sur le papier dans les livres. Quand on lit ‘Vangmayee Mâ’ d’une voix claire, il s’agit de quelque chose qui peut être vu aussi bien qu’entendu. Il n’est pas indispensable d'effectuer comme un rituel d'insufflation de vie à une statue pour la rendre consciente, ce qu'on appelle Pran-pratishtha C'est l'énergie même contenue dans la forme lumineuse de Mâ qui infuse son énergie à toutes ses paroles.

Nous tous, dans notre élan vital, déposons l’offrande

de nos prânam (prosternations) aux pieds de Mâ.

Le fils dévoué de Mâ, Bhaiji, devant lequel nous devrions nous incliner chaque matin, nous a enseigné cette obéissance dans son livre rempli de science spirituelle, « Matri Vandana ». A ce sujet, nous nous devons de citer quelques mots de Mâ concernant Bhaiji : « Bhaiji avait coutume de dire, à tout propos, que celui qui suivait pleinement et consciencieusement les conseils de Mâ, finissait par récolter les fruits de centaines d’années de sâdhanâ. En ne faisant que cela : suivre les conseils de Mâ. Bhaiji a vécu près de ‘ce corps’ avec cet intime sentiment (bhâva). »

Nous publions cet ouvrage à la mémoire de Bhaiji. Il fut la première personne à nous guider pour ce qui est du recueil et de la mise en ordre des paroles de Mâ.

Pour faciliter la lecture de ce livre, nous nous sommes efforcés, autant que faire se pouvait, d'en classer la matière sous différentes rubriques. Nous avons tenu compte, pour cela, des thèmes développés que nous avons placés dans des chapitres spécifiques. Il est possible toutefois, dans le cas précis des paroles de Mâ, que la solution adoptée ne soit pas idéale. En effet, selon l’avis de différentes personnes, cette disposition par catégories risque d’engendrer une certaine confusion, voire une interprétation erronée des textes. Et cela parce qu’un même mot de Sri Mâ peut être interprété de différentes façons, et, selon le niveau du lecteur, engendrer dans l’esprit de celui-ci, d’étranges vibrations. Les paroles de Mâ peuvent être classées de diverses manières. Certains mots, inclus dans une catégorie donnée, pourraient induire le lecteur en erreur et créer une certaine confusion au lieu de le mettre sur la juste voie. Il était préférable, dans cette situation de perplexité, d’invoquer la protection de la déesse du langage, Vangmayee Mâ et de revoir l’ensemble du projet, du début à la fin. De tout cela devra ressortir pour le lecteur le fait que Mâ est présente dans chacun des mots qu’Elle prononce, elle qui n’a aucune attente, elle qui est l’éternelle Mère Ananda-Mayî. Même si la disposition par catégories effectuée par le rédacteur n’a pas d’intérêt pour certains lecteurs, la recherche et l’étude en elle-même, quand on s’est placé sous la protection de Mâ, seront bénéfiques. En fin de compte, le mantra « il progresse » (charaiveti) sera celui qui mène à la victoire. L’étude et la recherche constituent l’âme de la sâdhanâ. Quand on s'y est vraiment plongé, les paroles qu'on y étudie deviennent comme les siennes propres.

Mâ a dit : « L’océan est dans la goutte, la goutte est dans l’océan ». C’est là le vrai principe éternel, tellement difficile à saisir et sujet à tant d’interprétations et de manifestations selon le moment et la situation. Tout d’abord, quelle est la signification de ce principe en ce qui concerne les paroles de Mâ ? Que veut dire Mâ lorsqu’elle affirme que « l’océan est contenu dans la goutte » ? Dans chacune des paroles de Mâ est contenu comme son thème central, son essence, l'océan de la Parole divine. Et ensuite, quel est le sens des mots « une goutte dans l’océan » ? Depuis l’aube des temps, les vibrations de tous les sons existants (manifestés ou non manifestés) y compris les sons grandioses et puissants, sont essentiellement mesurables comme des accumulations de grand homme énergétique. En d’autres termes, chaque son et chaque parole sont de la nature de l'énergie.

Ce livre de paroles de Mâ en hindi est traduit d'un original bengali.  

Le livre "Vangmayee Mâ", traduit de l’anglais en français récemment par Jean E. LOUIS, est disponible chez Geneviève Koevoets (Mahâjyoti) qui en a fait l’illustration :
7 Bd du Parc impérial 06000 Nice
Pour la somme de 20€+ 4€ de frais d’envoi.

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PAROLES DE CONSOLATION

MENANT A L’ABSENCE DE PEUR

Début de Vangmayee Ma, receuil de paroles de Mâ, classées  par thèmes

Mâ est là. Pourquoi s’inquiéter ?

Il y a ceux qui sont incapables de faire quoi que ce soit, ceux qui n’ont aucun soutien dans la vie spirituelle. C’est de ceux-là surtout dont j’ai besoin.

Si, le coeur empli de foi et de vénération, tu peux dire ne serait-ce qu’une seule fois « Oh ! Mâ, venez je vous en conjure, que mes journées ne se passent pas sans Vous ». Alors, assurément tu auras le darshan de Mâ, Elle apparaîtra devant toi dans Sa forme réelle et te serrera affectueusement sur Son coeur. Ne L’invoque pas uniquement lorsque tu es en proie à la détresse, en La considérant comme une protection magique ou un refuge momentané. Souviens-toi, Elle est toujours présente et si proche, qu’Elle est comme ton élan vital. Elle te soulagera de ton fardeau.

En vérité, Je suis toujours avec vous.

Vous vous demandez si ce que vous sentez arrive jusqu’à ce corps, n’est-ce pas ?

Oui, oui, oui.

                                                             

Ce corps aussi n’est qu’une petite fille impatiente que vous ne pourrez pas renvoyer, même si vous le désirez. Elle n’est jamais partie et ne partira jamais.

Ayez foi en ce corps. Seule une foi complète vous ouvrira les yeux.

Acceptez ce qui est bénéfique, (shreyas) rejetez ce qui ne fait que procurer du plaisir (preyas). Une aide propice va se manifester à coup sûr.

                                 

Un doute prend forme dans votre esprit – pourquoi la sâdhanâ progresse-t-elle aussi lentement ? Père, amis, vous savez que lorsque vous souffrez du ventre, le médecin commence par vous administrer un purgatif pour vous nettoyer les intestins. Ce n’est qu’après qu’il vous donne les médicaments. D’innombrables actions ont été accomplies durant cette vie et durant les vies précédentes. Aussi longtemps que leurs effets n’auront pas été épurés, le progrès dans la sâdhanâ sera lent. Une fois que le corps et l’esprit seront purifiés, le médicament, sous forme de nama-japa, fera son effet. Aucun d’entre vous n’a progressé jusqu’à ce point. Alors continuez à agir – qui sait quand viendra le moment propice ?  

L’accomplissement ne s’obtient que si on le demande. Mais la requête ne devrait se faire qu'avec un esprit sincèrement et complètement uni à la parole.

Ce corps est partout. Pour chacun.

Je ne vous abandonne jamais. Je suis toujours avec vous.

Vous avez eu suffisamment du jeu de l'intelligence durant votre vie. Victoire ou défaite, peu importe, tout cela appartient au passé. Même si c'est seulement une fois, réalisez que vous n'avez pas d'autres aides, regarder vers Lui et jetez-vous sur Ses genoux. Vous n'aurez pas à vous soucier de quoi que ce soit d'autre.

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Notre mère universelle Mâ Anandamayî

Personnification de l'amour de la compassion
Par Brahmacharini Kumar Chitra Ghosh

      Chitra a été une assistante proche de Mâ Anandamayî. Originaire de Calcutta, elle est revenue vivre dans ses ashrams après avoir fait un doctorat aux États-Unis. Le texte ci-dessous est une contribution à l'ouvrage ‘Mâ Anandamayî - incarnation de l'héritage spirituel et culturel de l'Inde’, publié en anglais par la Sangha de Mâ pour la Samyam Sapta de novembre 2005. Il s'agit d'un ouvrage de 120 pages qui réunit une trentaine de contributions brèves de personnes qui, en général, ont connu Mâ Anandamayî de près.

     En mai 1961, Mâ était à Bombay dans la propriété de feu Shri BK Shah, qui était le président de la Sangha d’Anandamayî. Tous les fidèles le Mâ le connaissent sous le nom de Bhaiya [grand frère]. Mâ résidait au milieu de son jardin dans une maisonnette de bois ressemblant à une pagode. [Cette maisonnette a été démontée lors de la vente de la propriété de Bhaiya après son décès et a été réinstallée dans le jardin de l'ashram de Mâ à Kankhal].

    Bhaiya avait fait la demande à Mâ de rendre visite à Gopinath Kaviraj au Tata Memorial Cancer Institute, où il se remettait d'une opération risquée pour cancer. Gopinath était l'un de ces philosophes chez lesquels une grande érudition et un savoir élevé étaient combinés avec une spiritualité profonde et une aspiration sincère pour expérimenter les vérités exposées dans les doctrines philosophiques.

    Gopibaba – comme Mâ l’appelait – devait bientôt quitter l'hôpital et Bhaiya a demandé instamment à Mâ d'avoir le kheyal de le visiter le jour même de sa sortie. Mâ a donc demandé à Bhaiya d'organiser cette visite. Les docteurs, les infirmières et le personnel de l'hôpital étaient très désireux d'avoir le darshan de Mâ. Ils étaient surpris de la guérison miraculeuse de Gopibaba après une invasion dangereuse de cancer à un âge tellement avancé. On fixa une date et j'ai eu la chance rare, et surtout la grâce de Mâ de l’accompagner avec Bhaiya et Swami Paramânandaji pour la visite à l'hôpital.

    Quand Mâ a pénétré dans la chambre de Gopibaba, il était déjà tout préparé pour quitter l'hôpital avec elle. Les docteurs et les infirmières avaient formé une ligne pour accueillir Mâ avec des guirlandes. Elle les a acceptées, mais leur a retourné les malas après les avoir bénis. Néanmoins, elle a mis de côté une grande guirlande de roses rouges. On a offert aussi à Mâ un panier de grosses pommes rouges. Elle les a distribuées et en a mis deux de côté. Elle me regarda et me demanda de conserver la guirlande de roses rouges et les deux pommes, en disant en bengali Rakho parey lagbec'est-à-dire :  « Garde-les pour être distribuées plus tard ! »

    À ce moment-là, Mâ, de sa voix douce débordant de compassion, remercia les docteurs et les infirmières pour leur service envers Baba, désintéressé et infatigable. Ils lui répondirent tous : « C'est votre bénédiction, votre kheyal [intuition spirituelle sûre] et votre grâce qui a sauvé miraculeusement Baba – nous n'avons été que les instruments de Dieu – rien d'autre ! » Sur ce, j'ai entendu une voix faible, comme en train de pleurer et de prononcer trois fois ha Allah !  Je me suis rendu à la porte de la chambre d'à côté et j'y ai jeté un coup d'oeil. Pendant ce temps, Mâsupervisait l'organisation du voyage de Baba en chaise roulante. À l'intérieur de la chambre d'à côté j'ai vu un musulman arabe, un patient cancéreux, avec une barbe brune, étendu à plat sur son lit. Son corps était tellement émacié qu’il ressemblait à un squelette. Le milieu de sa poitrine était affaissé, et des larmes de douleur aiguë et de souffrance coulaient sur ses joues creusées. Il était secoué régulièrement de hoquets. De temps à autre il prononçait faiblement Ha Allah ! Ses yeux étaient fermés. L'infirmière qui s'en occupait me dit qu'il était un cancéreux au stade terminal.

    Je retournai près de Mâ. Elle se rendit dans le couloir vers les ascenseurs avec Gopibaba et sa troupe de docteurs et l'infirmière. Soudain, elle revint en arrière et sans un mot, marcha fermement vers la chambre du patient arabe musulman. Bhaiya semblait déconcerté, Paramânandaji semblait serein ; les autres et Gopibaba étaient fascinés et s'arrêtèrent simplement en route, stupéfaits !

    Je suis rentré avec Mâ dans la chambre du patient arabe. Bhaiya et tous les autres se tenaient à l'extérieur. Mâ dit en souriant : « Baba, je suis venu à vous, regardez-moi ! ». En disant ceci, elle caressa la poitrine déprimée de ce cancéreux au stade terminal, trois fois, avec un toucher rempli de compassion douce et de félicité céleste. J'ai senti qu'en faisant ceci elle était en train de lui donner la libération des liens humains et des filets de la mortalité. Ensuite elle lui essuya les larmes qui coulaient en abondance avec le coin de son pagne. Puis elle saisit la guirlande de roses rouges de mes mains et la plaça autour de la  nuque du patient musulman. Peu après, elle me prit l'une des deux grosses pommes et la déposa entre ses mains jointes. Quant à l'autre, Mâ la donna à l'infirmière. Maintenant le patient ouvrit lentement les yeux et fixa Mâ avec un long regard plein de gratitude – il prit sa main et la plaça sur sa propre tête. Mâ lui fit un geste signifiant qu'il devait continuer à répéter son mantra du Coran. Ils eurent un échange prolongé de regards. Elle resta auprès de lui cinq minutes – ses yeux ressemblaient à des rayons X qui regardaient à travers lui comme si elle pouvait être le témoin de son passé, de son présent de son futur en un seul instant. Je me mis à pleurer, en voyant cette union spirituelle du véritable fidèle et de Dieu au-delà des distinctions de castes, de credo, de religions et de nationalités. Mâ savait que c'était son premier et dernier darshan. Elle s'en alla à reculons, au lieu de se retourner, afin que le patient puisse la voir jusqu'à ce qu'elle soit sortie de la chambre. Les docteurs lui dirent que ses jours étaient comptés. En effet, le lendemain je pris l'initiative de demander à Bhaiya de se renseigner pour savoir quel était son état de santé. L'après-midi, il me dit que le patient était décédé la nuit même paisiblement. Je me précipitai pour annoncer la nouvelle à Mâ, mais avant que je n’ai pu ouvrir la bouche elle me dit en bengali : Arab desher Baba chole gacchay « Le baba des pays arabes est parti ! »

   Ainsi, la grâce de Mâ qui n'avait même pas été sollicitée (ahetuki kripa) a hâté son retour dans le séjour du royaume des cieux, où on trouve une paix perpétuelle. Le baba arabe s'était éteint.

Seulement Lui (le Divin) sait à qui Tu (Mâ)  te révèles

et une fois que vous L'avez connu vous devenez un avec Lui.

(Ramayana de Tulsidâs)

Mâ Anandamayî, embodiement of India’s Spiritual and Cultural Heritage, p.110

Mâ Anandamayî  Sangha Kankhal 249408 Hardwar Uttarakhand Inde, 2005

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INDRA LILA,

Le jeu d'Indra ou le mental illuminé.

A VIGYANANANDA
et aux amis de Cilaos

                                                                                                                                                               

Joëlle Coiret est venue participer à une retraite sur l'écoute du silence à l'île de la Réunion animée par Vigyanânanda, dans le cirque de Cilaos, pendant les quatre jours du week-end de l'Ascension 2009. Pour meubler ce silence, des orages tropicaux et le tonnerre étaient au rendez-vous, se réverbérant sur la falaise de 1000 m de dénivelé qui mène au Piton des neiges, se dressant juste en face du lieu du stage. Ceci lui a inspiré le poème ci-dessous. Joëlle vient de prendre sa retraite de professeur de littérature française, et aime bien venir marcher en Himalaya.

Les premiers jours, loin de nous déplaire,

Indra, dieu des orages et de l'atmosphère,

Nous isola sous une coupole

De pluie continue et de vent fol.

Incarnant l'exubérance de la vie,

Armé du vajra pour vaincre l'ennemi,

-Notre mental vaniteux ou dispersé-,

Il éclaira nos âmes de paix.

Il envoya aussi le tonnerre

Et ses résonances extraordinaires

Pour révéler de l'espace l'immensité,

Au-delà de Cilaos, dans ses remparts, enfermé.
Surya rivalisa avec lui:

L'Indra-danush, l'arc-en-ciel en sanskrit,

Dans ses magiques apparitions

Inspira de poétiques méditations:

L'arc du silence lançait allègrement

La flèche de nos âmes visant

La cible éternellement présente du Soi,

Et les coeurs glorieux vibraient d'une joie,

Qui se répandait en ondes illimitées

Jusqu'aux frontières de l'Incréé.

a) Vajra : -foudre ;  -objet utilisé dans les rituels bouddhistes, symbole de l'illumination. Chez les Tibétains, le dorje représente l'Absolu, l'unité au-delà des opposés, la force.
b) Danush : arc, symbole de la conscience et de la détermination.

Joëlle COIRET.
Ascension. Mai 2009
Cilaos, Ile de La Réunion

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A  MA  VIEILLE  AME

(Confession à Mâ… dans l’avion pour l’Inde)
Par Mahâjyoti

Ma vieille âme est déjà partie !

La blonde aux yeux bleus est restée

Près de Mâ…afin de déjouer

Les pièges et ruses de la vie…

Ma vieille âme est un vieux barbu

Etait-ce un Sage ? Un vrai Mystique ?

Elle donne un contraste un peu cru

Avec ma blondeur dynamique.

Ma vieille âme comprend trop de choses

Son magnétisme, ses vibrations,

Comme un cri en mon ‘moi’ se posent

Et on me pose des questions…

Car la blonde demeure incomprise

Pour qui ne sait pas lire au fond

Et pourtant son ego se brise

Au cœur de sa méditation.

Elle sait combattre pour de bon

Lorsqu’en titubant elle avance

Elle sent, telle une imprégnation,

La lumière et l’impermanence…

L’avion a pris de l’altitude

L’Inde est au bout de son chemin

Le silence et la solitude

Désormais lui tiennent la main.

Un jour en rencontrant ‘quelqu’un’

Elle eut la notion du Divin…

La blonde pourra rejoindre enfin

Ce vieux qui est parti si loin….

Ce vieux qui dirigea sa vie

Voyez, je vous l’avais bien dit :

Ma vieille âme est déjà partie…

Pourquoi n’avez-vous pas compris… ?

Geneviève  KOEVOETS
(Mahâjyoti)

"Le pessimiste voit des difficultés dans chaque opportunité...

L'optimiste voit des opportunités dans chaque difficulté..."

Nouvelles

-  A Kankhal ce mois d'août 2009, nous avons eu pour neuf jours un groupe de 27 Français venus faire retraite auprès de Swami Vijayânanda. Dinesh et Vigyanânanda se sont occupés de leur séjour, auparavant ils ont fait une visite de trois jours de Bénarès et ensuite rencontré SwamiJñanananda et Chandra Swami dans la région de Dehradun, en plus d’une visite de Rishikesh. Le voyage a duré en tout trois semaines

- Swami Nirgunânanda a animé une retraite de huit jours au Rosaire, une institution religieuse dans les environs de Bruxelles, qui a été suivie avec intérêt par les francophones. La retraite a été organisée par Paul et Christine Neefs. Swamiji a préparé une traduction avec commentaires des lettres de Mâ à Pran Gopal Mukerjî, Paul a déjà fait la traduction française des lettres, une publication est prévue dans le Jay Mâ à partir du prochain numéro. Nous avions déjà publié quelques lettres de Pran Gopal il y a plusieurs années dans ce même Jay Mâ.

- Vigyanânanda est de retour maintenant à l’ermitage de Dhaulchina et à plus long terme pour deux ans en Inde, après quatre mois et demi de séminaires et conférences qui l'ont amené en France, Belgique, Suisse, Italie (pour un congrès  de la Fédération italienne de yoga près de Venise), et cinq semaines à la Réunion, avant de revenir à Kankhal pour la retraite d’août auprès de Swami Vijayânanda.

Nouveaux abonnements

Les nouveaux abonnements par email, pour deux ans, sont en cours. Ils iront de Mars 2009 à Mars 2011.La souscription peut être réglée dès maintenant en envoyant comme d’habitude la somme de 8 € (soit 1 euro par exemplaire trimestriel) par chèques à l’ordre de Jacques VIGNE, à : José SANCHEZ-GONZALEZ – (nouvelle adresse depuis Novembre 2008) :

10 rue Tibère - 84110 VAISON-LA-ROMAINE – nagajo3@yahoo.fr  - 06 34 98 82 22 - qui conservera la partie administrative. Prière d’aviser ‘ensuite’ (une fois le paiement effectué) par email ou par téléphone : Geneviève Koevoets (Mahajyoti) koevoetsg@wanadoo.fr pour qu’elle poursuive les envois, car c’est elle qui s’occupe, bénévolement, de la partie artistique, littéraire, de la mise en page, et des envois par emails ainsi que des illustrations. Pour ceux qui souscriront en retard ou en cours d’année, elle leur enverra les numéros arriérés afin qu’ils soient à jour de leur abonnement complet.

C’est une aide qui va à PANUDA à Bénarès, pour soutenir les éditions indiennes de « Amrita Varta ». (Panuda sert Mâ depuis plus d’un demi siècle et dirige son hôpital).

Table des matières

Paroles de Mâ,  extraites de ‘Vangmayee Ma’

Dialogues avec Mâ,  extraits de ‘La saturée de joie’ de Jean-Claude Marol

Préface au recueil de paroles de Mâ ‘Vangmayee Ma’, par Vigyânânanda

Introduction à la version hindi de ‘Vangmayî Mâ’

Paroles de consolation menant à l’absence de peur, extraites de ‘Vangmayee Ma’

Notre mère universelle Mâ Anandamayî,  par Brahmacharini Kumar Chitra Ghosh

Indra Lila, le jeu d’Indra ou le mental illuminé, par Joëlle Coiret

A ma vieille âme… par Geneviève Koevoets (Mahâjyoti)

Nouvelles

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Table des matières